La Serbie «doit démontrer que personne n'est au-dessus des lois» sur son territoire et qu'elle prête à déférer à la justice «toute personne inculpée pour des crimes graves», tonne le commissaire européen à l'élargissement, Olli Rehn. Aussi longtemps qu'elle ne le fera pas, elle ne se rapprochera pas de l'Union.
Bruxelles a décidé hier de «suspendre» les négociations qu'il a entreprises avec Belgrade en vue de conclure un accord européen d'association et de stabilisation qui ouvrirait la voie à une adhésion ultérieure de la Serbie à l'UE. Olli Rehn a en effet reçu une «évaluation négative» de Carla Del Ponte sur la coopération entre Belgrade et le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), dont la Suissesse est la procureure.
Carla Del Ponte a inculpé de génocide, de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie, Ratko Mladic, mais il est pour Bruxelles «décevant de constater que Belgrade a été incapable de localiser, d'arrêter et de transférer à La Haye» ce criminel - il se cacherait en Serbie, sous la protection de certains responsables des forces de sécurité du pays.
En septembre, les Vingt-cinq avaient mis Belgrade en demeure de «coopérer pleinement» avec le TPIY, en faisant explicitement référence aux problèmes que pose l'évanouissement dans la nature de Ratko Mladic et de l'ancien dirigeant politique des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic. Dans ce contexte, la Commission avait donné jusqu'à hier aux autorités serbes pour capturer Ratko Mladic. En vain. «Nous sommes donc obligés de suspendre les négociations», qui auraient dû se poursuivre le 11 mai.
Olli Rehn a toutefois annoncé que Bruxelles sera prêt à reprendre les pourparlers dès que le TPIY rendra un avis positif sur la Serbie. «L'objectif initial de les conclure avant la fin de 2006 est toujours réalisable», a assuré le Finlandais, en ajoutant que la Serbie a «clairement un avenir européen».
Il sera cependant tributaire de certaines réformes. «Les forces armées et les services de sécurité doivent être entièrement placées sous contrôle démocratique», a souligné le commissaire, en appelant «toutes les forces démocratiques» du pays à oeuvrer en ce sens. Ce n'est pas la première fois que l'Union européenne se fait le chantre de «l'Etat de droit» dans les Balkans occidentaux et agit en conséquence.
Les Vingt-cinq avaient ainsi reporté à plusieurs reprises l'ouverture des négociations d'adhésion de la Croatie à l'Union. Elles se sont finalement ouvertes le 3 octobre 2005, après que Zagreb se fut décidé à livrer un de ses anciens généraux en fuite, Ante Gotovina, au TPIY. / TVE