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L'Espagne retire le sel de l'eau

Baignée par la Méditerranée, l'Espagne mise sur le dessalement d'eau marine pour pallier ses pénuries hydriques structurelles, intensifiées par la sécheresse. Et la construction de trois énormes usines de dessalinisation a été lancée ce mois-ci sur les côtes. L'un de ces chantiers se trouve à Torrevieja, près d'Alicante. La future usine aspire à devenir la plus grande d'Europe avec une production de 80 millions de m3 d'eau potable par an, selon le Ministère de l'environnement.

22 août 2006, 12:00

Pour l'instant, celle qui détient ce titre est à Carboneras près d'Almeria, une des régions les plus désertiques d'Europe. Inaugurée en mai 2005, elle ne fonctionne qu'à 10% de sa capacité de 42 millions de m3 annuels, qu'elle atteindra fin 2007, selon le chef de l'usine, José Alonso Cozar.

Arroser le désert de Tabernas

L'eau des usines de dessalement est destinée aux zones urbaines mais surtout à l'agriculture, qui absorbe déjà 78% de l'eau consommée en Espagne, selon des chiffres de l'Institut national de la statistique (INE).

Dans le cas de Carboneras, 15 hm3 d'eau iront aux villes, 27 hm3 à l'agriculture - majoritairement des cultures sous serres de fruits et légumes - dont 4 hm3 à l'arrosage du désert de Tabernas pour y faire pousser des oliviers.

Le prix de l'eau sera de 0,6 euro le m3, «un peu plus que la moyenne» en Espagne (0,5 euro le m3) «contre 2,3 /2,5 dans des pays comme l'Allemagne», selon José Alonso Cozar.

Le pari sur le dessalement est celui du gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero, qui a annulé en juin 2004 un projet du précédent exécutif conservateur qui consistait à détourner des eaux du plus grand fleuve du pays, l'Ebre, vers les régions arides du sud et l'est de l'Espagne.

Mieux gérer les ressources

Le projet de transvasement, titanesque, devait fournir 1050 hm3 au littoral méditerranéen. Mais il avait suscité des conflits entre régions humides et sèches et les critiques des écologistes inquiets des conséquences sur l'environnement et le paysage.

Le gouvernement socialiste a donc décidé de fournir 713 millions de m3 d'eau par an par le biais d'une quinzaine de grandes usines de dessalement, et le reste grâce à une meilleure gestion des ressources.

La dessalinisation n'est pas une nouveauté pour l'Espagne où il y a déjà depuis 1965, 700 usines de dessalement, mais de petite taille et qui ne produisent que 292 millions de m3 par an. En Europe, d'autres pays utilisent les mêmes techniques: l'Italie, la Grèce, la Turquie et Chypre.

Les écologistes, satisfaits de l'annulation du projet du précédent gouvernement, expriment toutefois des réticences sur les usines de dessalement.

«Il faudrait faire un effort pour mieux gérer les ressources au lieu de stimuler la demande en proposant davantage d'eau qui alimentera le développement touristique et immobilier du littoral méditerranéen», explique Maria José Caballero, de Greenpeace.

La militante fait référence aux paysages controversés de tours de béton ou de golfs verts visibles dans de nombreuses zones arides d'Espagne. La consommation d'eau par habitant a augmenté de 2,4% en 2004 en Espagne, se situant à 171 litres par personne par jour, selon l'INE qui précise que 17,9% de l'eau a été perdue en cours de distribution.

Ces chiffres contrastent avec la sécheresse que vit l'Espagne depuis la troisième année consécutive, au point que les réserves d'eau sont tombées, selon le Ministère de l'environnement, à 43,9% de leur capacité, le pire chiffre depuis dix ans.

Quant aux usines de dessalement, l'association écologiste s'inquiète principalement des rejets de saumure (eau fortement salée) qui pourrait dégrader les prairies sous-marines hébergeant des «centaines de plantes et d'animaux» qui font office de rempart contre l'érosion côtière. / MDR-afp

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