Israël: Ehud Olmert condamné, retour en politique illusoire

La justice israélienne a condamné mardi à 6 ans de prison l'ancien Premier ministre Ehud Olmert pour corruption passive dans l'affaire du contrat du complexe immobilier "Holyland" à Jérusalem. L'intéressé dément.

13 mai 2014, 16:17
epa04148147 Former Israeli Prime Minister Ehud Olmert attends a hearing at Tel Aviv's District Court, in Tel Aviv, Israel, 31 March 2014.  Former Israeli prime minister Ehud Olmert was found guilty 31 March of accepting bribes during his terms as major of Jerusalem and as trade and industry minister, between 1993 and 2006. Olmert and a host of other defendants were accused of smoothing over legal and zoning restrictions for a construction project in south-west Jerusalem, known as Holyland, in return for money.  EPA/Dan Balilty / POOL

L'ex-Premier ministre israélien Ehud Olmert a été condamné mardi à six ans de prison pour corruption passive en lien avec un projet immobilier lorsqu'il était maire de Jérusalem. L'intéressé dément toute malversation. Cette condamnation brise ses chances d'un retour en politique.

"Un fonctionnaire qui accepte des pots-de-vin peut être assimilé à un traître", a estimé le juge David Rozen, du tribunal de Tel Aviv. Selon lui, Ehud Olmert "est un criminel qui a consacré l'essentiel de son temps à la louable tâche du service public, (mais) il s'est aussi rempli les poches".

Le juge Rozen a suivi mardi les réquisitions du parquet au sujet de la durée d'emprisonnement d'Ehud Olmert, auquel il a aussi infligé une amende d'un million de shekels (environ 258'000 francs). L'ancien Premier ministre n'a pas réagi publiquement à l'issue de l'audience, au cours de laquelle il est resté impassible.

Le juge a par ailleurs ordonné à Ehud Olmert, 68 ans, de se présenter le 1er septembre pour être incarcéré. Cela devrait laisser le temps aux avocats de l'ex-Premier ministre d'interjeter appel auprès de la Cour suprême contre le verdict de culpabilité rendu le 31 mars. L'examen de ce recours pourrait prendre plusieurs mois.

Du jamais vu

Jamais un ancien chef de gouvernement n'avait été condamné à une peine de prison en Israël. En revanche, un ancien président (Moshe Katsav), un ancien ministre des Finances et un ancien ministre de l'Intérieur l'ont déjà été.

L'affaire pour laquelle Ehud Olmert est sanctionné concerne le contrat du complexe immobilier "Holyland" à Jérusalem. Il a été jugé coupable de deux chefs d'accusation de corruption.

Selon la justice, il a accepté 500'000 shekels (plus de 128'000 francs) de la part des promoteurs de "Holyland" et 60'000 shekels (plus de 15'000 francs) dans le cadre d'un autre projet immobilier. Il a également été reconnu coupable de faux témoignage pour avoir tenté de ternir la réputation du témoin principal de l'accusation.

Ce bon vivant, amateur de costumes élégants et de cigares, a été mêlé à plusieurs affaires de corruption. Il n'avait jusqu'alors été condamné qu'à une peine de prison avec sursis en septembre 2012 pour abus de confiance.

Contraint à la démission

D'abord figure de proue de la droite nationaliste au sein du parti Likoud, il a évolué vers des positions plus modérées. Après avoir rêvé du Grand Israël, il a fini par accepter la création d'un Etat palestinien sur la quasi totalité des territoires occupés.

Ehud Olmert a été maire de Jérusalem de 1993 à 2003. Il est parvenu au pouvoir en 2006. Il succède alors à Ariel Sharon, homme fort de la droite, foudroyé par une attaque cérébrale. Olmert l'avait convaincu de créer un nouveau parti de centre droit, Kadima, en novembre 2005.

Politicien chevronné

Ce politicien chevronné a été Premier ministre de 2006 à 2009. Sans réel charisme, il n'a pas été, de son propre aveu, un Premier ministre "très populaire".

Sa chute commence en juillet 2008, quand, de plus en plus fragilisé par les accusations de corruption, il renonce à se présenter aux élections primaires de son parti Kadima. Il abandonne de facto ses fonctions de Premier ministre.

Il est toutefois resté au pouvoir à titre intérimaire, jusqu'aux élections législatives qui ont porté au pouvoir l'actuel chef du gouvernement Benjamin Netanyahu.

"Turpitude morale"

Les propos critiques qu'il a tenus à l'égard de ce dernier au sujet de l'actuel processus de paix israélo-palestinien ont alimenté les rumeurs concernant son retour en politique. En prononçant sa peine mardi, le juge a estimé que les faits qui lui sont reprochés relevaient de la "turpitude morale", ce qui le rendrait inéligible pendant sept ans après la fin de sa peine.

Treize autres prévenus comparaissaient dans le cadre de l'affaire "Holyland". Six ont été condamnés à des peines de prison allant de trois à sept ans.