Les Etats-Unis ont à nouveau appelé dimanche les dirigeants irakiens à dépasser les divisions confessionnelles pour faire face à la menace des insurgés jihadistes de l'EIIL. Ceux-ci ont pris ce week-end le contrôle de plusieurs localités dans l'ouest du pays.
"L'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) porte une idéologie prônant la violence et la répression. C'est une menace non seulement pour l'Irak mais aussi pour la région toute entière (...). Nous sommes à un moment critique où nous devons exhorter les dirigeants irakiens à dépasser les considérations confessionnelles et à parler à tous", a estimé le secrétaire d'Etat américain John Kerry.
Le chef de la diplomatie américaine s'exprimait du Caire, première étape d'une tournée au Moyen-Orient et en Europe. Il entend pousser les chefs d'Etat de la région à user de leur influence sur le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki pour le convaincre de former rapidement un gouvernement d'union nationale, l'Irak étant sans cabinet depuis les élections d'avril.
Téhéran contre toute intervention
"Les Etats-Unis ne cherchent pas à sélectionner ou choisir quiconque (...). C'est au peuple irakien de choisir ses dirigeants", a martelé M. Kerry, estimant que son pays n'était "pas responsable" du fait que l'Irak soit désormais au bord du chaos.
Le président américain Barack Obama a déclaré jeudi que les Etats-Unis étaient prêts à une "action militaire ciblée et précise" en Irak et qu'ils allaient envoyer des conseillers militaires pour aider les autorités irakiennes à faire face à l'offensive de l'EIIL.
Dans une interview accordée vendredi à la chaîne CBS et diffusée dimanche, M. Obama a mis en garde contre les dangers que représente l'offensive fulgurante de l'EIIL. "Leur idéologie extrême constitue une menace à moyen et à long terme" pour les Etats-Unis. Selon lui, les jihadistes déstabilisent l'Irak mais ils peuvent aussi "déborder sur des pays alliés comme la Jordanie".
Dans ce contexte, le guide suprême iranien, l'ayatollah Ali Khamenei, a exprimé dimanche son hostilité à toute intervention américaine en Irak. Il a estimé que le conflit n'était pas d'ordre religieux, entre chiites et sunnites, mais qu'il opposait les partisans de l'influence américaine et ceux d'un Irak indépendant.
Avancée jihadiste
Sur le terrain, les insurgés sunnites consolidaient leurs positions dans l'ouest irakien. Ils se sont emparés dimanche de trois villes de la province d'Al-Anbar - Al-Qaïm, Rawa et Aana. Selon des officiers et des médecins, les insurgés ont exécuté 21 responsables locaux depuis samedi à Rawa et Aana.
L'armée a affirmé s'en être retirée pour des raisons "tactiques" de "redéploiement". Ces trois villes sont situées près de l'autoroute reliant la Syrie à Al-Anbar. Une province où les insurgés ont déjà pris Fallouja et des secteurs de Ramadi, le chef-lieu de la province.
Prise de deux postes-frontière
Les insurgés se sont également emparés de deux postes-frontière avec la Syrie, ceux d'Al-Qaïm et d'Al-Walid. Cette prise représente un succès important, car elle permettrait désormais aux insurgés sunnites de faire passer du matériel militaire des territoires qu'ils contrôlent en Syrie vers l'Irak.
Il n'existe que trois points de passage officiels sur les 600 km de la poreuse frontière entre l'Irak et la Syrie. Le dernier est aux mains des forces kurdes. Une grande partie du reste de la frontière échappe au contrôle des forces gouvernementales, irakiennes comme syriennes.
Raids meurtriers
Celles-ci tentent de reprendre du terrain aux insurgés. Selon la télévision d'Etat irakienne, une frappe aérienne a tué 40 insurgés à Tikrit (nord), alors que des témoins ont fait état de la mort de sept personnes au centre-ville, sans préciser si ces victimes étaient ou non des combattants.
A l'est de Tikrit, des combattants ont affronté les forces de sécurité, secondés par des tribus pro-gouvernementaux, et tué un conseiller du gouverneur provincial.
De l'autre côté de la frontière, l'aviation syrienne a bombardé samedi des zones tenues par l'EIIL, selon des témoins et des sources de l'opposition syrienne. Cinq raids ont fait au moins 16 morts dans les quartiers résidentiels de Mouhassane, une ville dont les chefs tribaux ont fait allégeance aux jihadistes.