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Briser le tabou du petit coin

La World Toilet Organization veut lutter contre la peur du ridicule et la gêne qui entourent encore trop souvent l'évocation de nos besoins naturels. Elle souhaite dans la foulée améliorer notre confort uel est le plus grand défi du XXIe siècle: limiter le gaspillage en eau et en papier hygiénique dans les pays occidentaux ou assurer de meilleures conditions sanitaires aux habitants des pays en développement? La question n'est pas si «cul-cul».

11 oct. 2006, 12:00

Selon une enquête de l'organisation écologiste WWF, 5000 arbres sont abattus tous les jours pour les besoins quotidiens des Suisses en papier WC et domestique. D'un autre côté et selon l'Organisation mondiale de la santé, 2,6 milliards d'êtres humains n'ont pas d'accès à des toilettes.

Susciter l'intérêt

Retenir les uns et pousser les autres, tel est le but de la World Toilet Organization (WTO), qui présentait récemment ses activités à Lausanne. Fondée en 2001 à Singapour, elle inaugurait aussi une exposition sur l'esplanade du Flon montrant des figurines de taille humaine cherchant désespérément dans le paysage un petit coin pour se soulager. Une installation qui n'est pas innocente, car la WTO espère par ce biais susciter suffisamment d'intérêt pour créer une section en Suisse.

Encore faut-il oser parler de nos excréments! Pour Jack Sim, fondateur de la WTO, tout le problème est là: on évite trop souvent d'évoquer ouvertement nos besoins naturels par peur du ridicule. «On parle de ce qu'on boit et de ce qu'on mange, mais jamais de la manière dont on l'évacue. Demandez à quelqu'un combien de fois par jour il se rend aux toilettes et vous verrez que, dans la plupart des cas, il n'a jamais réfléchi à la question», dit-il.

De même, on verra des politiciens inaugurer des fontaines, un éclairage public, un abri de bus, mais beaucoup plus rarement des toilettes publiques. La fin du XXe siècle a vu le tabou de la sexualité éclater en mille morceaux, le XXIe siècle sera-t-il celui de la fin du tabou entourant les toilettes, où l'être humain se rend jusqu'à six fois par jour?

Fondateur de la section allemande de WTO, Thilo Panzerbieter en appelle presque aux linguistes de la Terre: «Quels termes utilisons-nous pour décrire ce que nous faisons aux toilettes? Jargon médical? Expressions enfantines? Un langage approprié n'existe tout simplement pas».

L'Euro 2008: aïe!

Thilo Panzerbieter se fait aussi du souci pour la Suisse. A-t-elle prévu suffisamment de toilettes pour l'Eurofoot en 2008? Si oui, de quoi auront-elles l'air? Et de déplorer ces nations dites «riches» qui offrent à leurs citoyens des WC publics puants, mal éclairés et peu sûrs, des WC qui ne sont souvent pas adaptés aux handicapés, aux mères avec un enfant et à tous ceux qui tiennent à garder leurs souliers propres...

«On parle de ce qu'on boit et de ce qu'on mange, mais jamais de la manière dont on l'évacue»

«Les toilettes ne devraient pas être un problème», insiste-t-il. Or, dans sa vie, une femme perd passablement de temps à les chercher, que ce soit à New York, N'Djamena ou Salavaux. «Il n'est pas normal que quelqu'un ait l'impression, après avoir visité une toilette publique, que le niveau de vie baisse en Suisse», avertit Thilo Panzerbieter.

Citoyens et citoyennes, plaignons-nous pour qu'à l'avenir les fournisseurs de matériel hygiénique, les autorités et autres responsables de lieux publics tremblent comme une feuille de papier Q en constatant leurs défaillances. «Parce qu'il en va de notre santé, de notre hygiène et de notre bien-être!», poursuit Thilo Panzerbieter.

Briser le tabou pour ensuite mettre la vitesse supérieure en matière de génie sanitaire: voilà le message que veut faire passer la WTO. Pour les pays riches, il s'agit d'économiser l'eau et le papier grâce à de nouvelles techniques. Pour les pays en développement, il s'agit d'améliorer l'accès à des installations sanitaires dignes de ce nom.

C'est mal parti

Pour l'instant, c'est assez mal parti. Thilo Panzerbieter, ingénieur, explique que pas une seule fois, durant ses études en Allemagne, il n'a été question de nos WC.

Creuser, mais aussi informer. Au Sri Lanka, Thilo Panzerbieter a ainsi constaté qu'on avait construit de jolies toilettes extérieures... alors qu'il n'y en avait pas auparavant et sans rien expliquer à personne. Pays riches, pays pauvres, même combat: de nos toilettes, parlons-en! / MAG-La Liberté

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