Selon le décompte du président, 55 réformes ont été lancées en une année! Certaines très impopulaires (fiscalité, justice, réduction des fonctionnaires), d'autres plus dans l'air du temps (régime des retraites, fin des 35 heures). Mais en ouvrant tous les chantiers à la fois, le risque n'est-il pas de s'empêtrer dans l'inachevé, source d'insatisfaction générale?
Pas sûr, répond Michel Colomès («Le Point»): «En faisant beaucoup de réformes en même temps, il y a des perdants et des gagnants, mais au final cela s'équilibre.» En d'autres termes, la stratégie présidentielle, basée sur le volontarisme, produit une sorte de savant brouillage. Avec pour effet l'absence d'un solide front social, malgré les multiples oppositions à ses projets.
Tout a été dit, depuis une année, sur la vraie rupture introduite, à savoir celle du style présidentiel. Pour avoir mal maîtrisé son image, publique et privée, le président a dû opérer ce printemps un brutal virage: revoir toute sa communication, réadopter une certaine pompe élyséenne.
Symbole de ce retour «à la tradition», sa prestation TV du 24 avril s'est déroulée sur le ton tranquille d'un chef d'Etat, plutôt sobre, recevant des journalistes révérencieux sous les ors d'un palais de la République très «grand siècle».
Après un an de couacs, de bisbilles ministérielles, Nicolas Sarkozy assure qu'il a sifflé la fin de la récréation. Désormais, plus question d'entendre un ministre égratigner ouvertement un autre. Quant au premier ministre François Fillon, très populaire, il a bloqué jusqu'à aujourd'hui tout remaniement gouvernemental.
Selon les exégètes de l'Elysée, aucun remaniement spectaculaire n'est à prévoir durant la présidence française de l'Union européenne, à savoir jusqu'en janvier 2009.
La lecture de la presse étrangère est édifiante: aucune rupture n'est attendue quant au rôle de la France sur la scène internationale. En Europe, Nicolas Sarkozy est accusé de tirer la couverture à lui (nouveau traité européen, otages bulgares, Union pour la Méditerranée). Son atlantisme et son américanophilie ont eu pour contrepartie la plus visible un net refroidissement du fameux moteur franco-allemand.
Quant à ses initiatives en Colombie (affaire Ingrid Betancourt), elles relèvent du gadget diplomatique un peu naïf. Plus grave, son pragmatisme ou sa complaisance à l'endroit des régimes despotiques (Kadhafi, Ben Ali) laisse mal augurer un engagement sincère en faveur des droits de l'homme... / PBA-La Liberté