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Le contenu de nos assiettes alimente le débat des lecteurs d’«ArcInfo»

«Local ou bio, faut-il choisir son camp?» C’est la question posée à quatre spécialistes réunis par «ArcInfo» à l’occasion d’un débat qui a réuni 130 lecteurs mercredi à Evologia.

28 nov. 2019, 16:48
/ Màj. le 28 nov. 2019 à 18:26
Yann Huguelit, Lucien Willemin, Fernand Cuche et Jérémie Forney (de g. à dr.) lors du débat organisé par «Arcinfo» et animé par Stéphane Devaux, corédacteur en chef (à droite).

Les Neuchâtelois sont préoccupés par le contenu de leur assiette. Environnement, santé, économie: l’alimentation se trouve naturellement au centre des grands enjeux. Le défi universel que constitue la production agricole ne se laisse pas facilement emboîter dans de simples débats concernant la provenance ou le mode de production des aliments que nous consommons.

C’est l’un des enseignements du débat auquel «ArcInfo» a convié environ 130 lecteurs le mercredi 27 novembre au Mycorama, à Cernier. Yann Huguelit, directeur de la Chambre neuchâteloise de l’agriculture et de viticulture (Cnav), Lucien Willemin, militant en faveur de l’alimentation bio, Fernand Cuche, agriculteur et ancien Conseiller d’Etat, et Jérémie Forney, ethnologue de l’Université de Neuchâtel, ont croisé le fer pendant deux heures, avant de se sustenter avec des produits locaux préparés par l’Union des paysannes neuchâteloises.

Point de départ du débat: «Local ou bio, faut-il choisir son camp»? Dans les premiers échanges, Lucien Willemin et Yann Huguelit dévoilent leurs positions: pour le premier, c’est clair, «le mot de qualité, présent dans toutes les bouches, doit d’abord s’entendre en termes de sécurité alimentaire.»

Un travail essentiel

Manger non bio, c’est donc s’accommoder des pesticides de synthèse présents dans l’agriculture conventionnelle. Yann Huguelit rappelle, lui, la réalité économique: «Faire du bio, c’est bien, mais il faut qu’il y ait un marché en face pour écouler ces produits». Un paradoxe, dans un pays dont les habitants dépensent relativement peu pour l’alimentation, en comparaison internationale. «Il n’est pas normal que les paysans, même en Suisse, ne vivent qu’à peine, en faisant un travail si essentiel», remarque Lucien Willemin.

Fernand Cuche, avocat du bio depuis plusieurs décennies, invite à relativiser tout de même ce label: «Aujourd’hui, il n’y a pas de réel danger à consommer les produits agricoles conventionnels en raison des pesticides».

Yann Huguelit, Lucien Willemin, Fernand Cuche et Jérémie Forney (de gauche à droite). Photo: Christian Galley

Se passer de chimie

L’agriculture a progressé. Mais il avertit «Nous devons aller vers une agriculture qui se passe de produits chimiques. L’état des sols est mauvais, et c’est là la clé qui va nous permettre d’encore nourrir la planète à l’avenir».

Pour lui, le monde agricole «n’est pas suffisamment engagé dans ce sens» et les citoyens «ne sont pas conscients du rôle qu’ils peuvent jouer». «Le changement devra aussi venir des Etats. Il faudra un sursaut humaniste pour changer nos modes de consommation. Pour le moment, le politique s’est déculotté devant l’économie et la finance. Il faudra se battre avec les gens qui sont obnubilés par le fric».

Pour Fernand Cuche, «le politique s’est déculotté devant l’économie». Photo: Christian Galley

Inventer de nouveaux modèles

A l’arrivée, la conversation s’est aventurée en terrain plus meuble… Ce n’est en effet pas «en attendant que le consommateur et l’agriculteur changent leurs pratiques que l’on résoudra le problème environnemental», affirme Jérémie Forney. Du champ à l’assiette, il y a tout un système, qui comprend la distribution. Et pour l’ethnologue, «il est illusoire de penser que si les gens savent, ils changent! Le système économique induit des dépendances, et il faudra du temps pour transformer nos connaissances en nouvelles pratiques». Parmi celles qui ont déjà émergé: l’agriculture contractuelle de proximité, et ses abonnements à des paniers de légumes; la vente directe par les agriculteurs ou la vente en vrac. Mais les nouveaux modèles à même de nourrir la Suisse, et la planète, restent à inventer.

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