Une fonction fondamentale du sexe est l'association de gènes paternels et maternels afin que, notamment, il y ait des chances qu'un gène muté préjudiciable soit flanqué, atténué d'un gène homologue favorable, ou que surviennent des combinaisons génétiques inédites, potentiellement avantageuses. Comment diable les bdelloïdes traversent-ils tranquillement les âges sans ce puissant moyen d'adaptation?
Tout récemment, l'équipe du Pr Matthew Meselson, de l'Université Harvard, Cambridge, Massachusetts, a percé le mystère: si les bdelloïdes peuvent rester chastes, c'est parce qu'ils, ou plutôt elles, savent s'approprier des gènes d'autres organismes! Les chercheurs ont ainsi débusqué, insérés dans leur ADN, des gènes de bactéries, de champignons, de plantes et d'autres animaux?
En période de dessiccation extrême, les bdelloïdes voient se rompre les membranes de leurs cellules et, à l'intérieur de celles-ci, l'enveloppe du noyau gardien des chromosomes. On suppose, c'est à vérifier, qu'à la réhydratation, ce joyeux désordre est propice à l'incorporation de fragments de génomes «traînant» dans l'environnement à l'état de débris. «Ces animaux ont relevé les barrières usuelles empêchant l'insertion de matériel génétique étranger. Plus surprenant, ils font fonctionner certains des gènes ainsi gagnés», souligne le Dr Irina Arkhipova, de Harvard.
Les petites créatures gagnent-elles en adaptabilité grâce à ces emprunts? Incorporent-elles des gènes d'autres bdelloïdes - leur version du sexe, sans contact? Les études continuent. Plus pratiquement, la biologie médicale serait intéressée à comprendre comment ces animaux jonglent avec tant d'aisance avec les gènes? / JLR
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