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Le delta du Nil est menacé par la montée des eaux

Agriculture ruinée, populations déplacées, écosystèmes détruits: si rien n'est fait pour contrer le phénomène, le réchauffement climatique se traduira par un désastre de grande ampleur pour le fragile delta du Nil, estiment paysans locaux et experts.

25 janv. 2010, 04:15

Grenier de l'Egypte depuis l'antiquité, le delta qui s'étend à partir du Caire vers la Méditerranée voit déjà la montée des eaux ronger ses terres et stériliser les cultures par des remontées de sel. Au cours du siècle dernier, le niveau de la mer est monté de 20 centimètres, et une élévation d'un mètre encore suffirait à noyer 20% des terres du delta.

Selon un rapport gouvernemental récent sur le littoral d'Alexandrie, deuxième ville du pays, «une élévation des eaux de 30 cm est attendue d'ici 2025, inondant environ 200 km2» et provoquant l'exode d'un demi-million de personnes. D'ici la fin du siècle, pas moins de 7 millions d'habitants du delta pourraient ainsi devenir des «réfugiés climatiques».

Cette région fertile fournit environ le tiers des récoltes de l'Egypte, pays le plus peuplé du monde arabe avec quelque 80 millions d'habitants. Une bonne partie va à l'exportation, générant des revenus importants. Certains agriculteurs ont déjà abandonné leurs terres, et d'autres tentent de faire face en recouvrant les champs de lits de sable pour isoler les cultures du sous-sol gorgé de sel.

«Nous achetons ce sable, qui nous coûte très cher, afin de former une couche qui permette d'avoir des récoltes et de vivre, mais la vie est devenue très dure», déclare Al-Sayed Saad, un agriculteur installé entre Rosette et Alexandrie.

Des entreprises d'ingénierie spécialisées se sont déjà penchées sur le problème. Mahmoud Hamza, de Hamza Associates, a élaboré un projet pour relever la côte de deux mètres, en créant une digue empêchant à la fois l'eau de passer et les infiltrations salées de remonter.

Le projet a été soumis en 2007 mais n'a pas encore reçu d'approbation, de crainte notamment qu'il n'affecte les grandes plages très touristiques de la côte. L'Egypte reconnaît qu'elle est victime d'un réchauffement climatique planétaire, mais en rejette la responsabilité sur les grandes puissances industrialisées. «L'Egypte ne compte que pour 0,6% des émissions mondiales de gaz à effet de serre», relève Mohammed al-Raey, du Centre régional de réponse aux catastrophes. Toutefois, «il ne fait aucun doute que le changement climatique constitue une menace pour la sécurité alimentaire, et au delà pour l'ensemble du système social», estime-t-il.

«Si des zones doivent être inondées, il faudrait les transformer en zones piscicoles. Si d'autres doivent être protégées, alors il faudrait construire des digues», propose-t-il. Alors que le changement climatique ne figure pas dans les priorités officielles, «nous devrions considérer cela comme une question relevant de la sécurité nationale», estime cet expert.

Le complexe écosystème du Nil, fleuve le plus long d'Afrique, a déjà été profondément bouleversé dans les années 1960 par la construction du barrage d'Assouan, en Haute-Egypte. Cet ouvrage colossal a permis de réguler les crues souvent catastrophiques du fleuve, mais du même coup il retient les limons naturels fertiles qu'il charriait jusqu'au delta, entraînant un recours accru aux engrais chimiques. /FAH-afp

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