Quand viendra l’heure de repenser notre société et ses valeurs, deux idées qui ont fait leur chemin et commençaient à trouver leur débouché politique risquent de retourner au rayon des utopies: la nécessité de densifier l’habitat dans des mégalopoles toujours plus grandes, toujours plus hautes, pour limiter le mitage du territoire et préserver l’espace agricole; l’effort à mettre sur les déplacements par transports collectifs en remplacement de l’automobile, à bannir des centres-villes pour cause de pollution.
Qu’affichent les médias pour rendre l’espoir à la population enfermée dans des appartements mal isolés et exigus avec vue sur le bloc d’en face ou sur la place de jeux interdite? Ils montrent trop souvent des célébrités souriantes qui se «confinent», celui-ci dans son somptueux chalet, celle-là dans sa villa avec terrasse sur le lac. Tous rendus sur place avec armes et bagages grâce à leur voiture privée.
Difficile aussi de ne pas constater que les élites ne donnent l’exemple qu’en paroles.
Jamais il n’y eut autant de véhicules garés dans les chemins de forêts. Malheur au citadin simple piéton!
L’hebdomadaire «L’Illustré» a présenté le 25 mars un célèbre prix Nobel suisse, homme de grande qualité s’il en est, affirmant de son balcon «dans les sublimes paysages alpins valaisans» que le virus est le meilleur allié de Greta Thunberg car il a réussi la fermeture du Salon de l’auto, pour laquelle le savant milite en vain depuis des années. N’est-ce pas se bercer d’illusions? N’ira-t-on pas en sens contraire?
Difficile de prétendre s’opposer à la pensée de l’illustre professeur, mais difficile aussi de ne pas constater que les élites ne donnent l’exemple qu’en paroles. Comment dès lors éviter le retour du modèle de société fondé sur le transport individuel et la villa avec jardin privatif, favorisés par la politique des prêts à taux zéro?
A l’heure où nos certitudes mettent genou en terre, on n’évitera pas la réflexion de fond sur le rôle de l’État, la place des libertés, la mondialisation, l’aménagement du territoire.
La pensée politique fait un brutal retour à la page blanche.