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Point de vue de François Berger: «Pourquoi pas un été avec Valéry?»

«Valéry, notre contemporain brûlant, est un poète à lire d’urgence», relève François Berger, écrivain, éditeur, avocat. Comme d’autres personnalités locales, nous l’invitons à s’exprimer régulièrement sur des sujets d’actualité.

11 juin 2019, 16:00
Le poète français Paul Valéry (1871-1945).

Dans ce monde inondé par l’image sous toutes ses formes, celle de Paul Valéry peine à séduire. Trop sérieux? Anachronique? Voilà qu’on se fait vite une idée à partir non d’une connaissance de l’œuvre, mais d’une impression vague et de quelques mots lus ou entendus.

Peu importe qu’on devine notre erreur d’appréciation dans un recoin de la conscience. Ce qui mène le monde, c’est peut-être davantage la mauvaise foi que le sexe et l’argent.

Valéry aujourd’hui? Au Purgatoire avec tant d’autres! Une consolation: ce lieu mène toujours au Paradis! Certains ont donc cet avantage d’y être déjà allés avec l’assurance, selon les humeurs de l’époque, d’y retourner. Ces visites au purgatoire des lettres se font heureusement plus nombreuses.

Deux publications récentes, et quelques papiers, en témoignent: «Valéry, la crise de l’esprit et autres textes», éditions Soleil d’encre, et Régis Debray, «Un été avec Valéry», éditions des équateurs. Debray, philosophe, essayiste, écrivain prolifique qu’on ne saurait suspecter de conservatisme, lance sa campagne: Valéry notre contemporain brûlant est un poète à lire de toute urgence par temps de détresse.

La beauté devenue suspecte et l’harmonie ringarde? Ce serait absolument nouveau dans l’histoire des civilisations!

Degas, le grand peintre colérique l’a morigéné: «Vous avez un grand défaut, Valéry, vous voulez tout comprendre!» Leçon méditée et l’élève mal noté devient maître: «Pénétrez dans le temple d’une religion inconnue, considérez un texte étrusque, asseyez-vous auprès de joueurs dont le jeu ne vous fut appris et jouissez de vos hypothèses.»

Que faire devant ces livraisons contemporaines d’ouvrages de l’art où l’on cherchera en vain beauté, harmonie? Ils ont reçu l’aval de médias soucieux de l’air du temps! La beauté devenue suspecte et l’harmonie ringarde? Ce serait absolument nouveau dans l’histoire des civilisations! Alors? «Réapprendre à contempler un nouveau ciel, une nouvelle terre, s’exercer à s’ébahir des choses les plus communes», dit Valéry.

C’est l’innocent mais dynamique émerveillement qui fit les civilisations et qui fera la prochaine car, nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles, écrit-il. Mais le mort saisit le vif, pour reprendre cette expression chère aux juristes. A la condition qu’il y ait des héritiers et que l’actif de la succession ne soit pas totalement répudié!

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