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Point de vue de François Berger: «Carl Spitteler, le prix Nobel oublié»

«On regrettera, sous réserve d’une étude critique à paraître, le silence des éditeurs suisses en ce 100e anniversaire du prix Nobel», relève, à propos de Carl Spitteler, François Berger, écrivain et éditeur. Comme d’autres personnalités locales, nous l’invitons à s’exprimer régulièrement sur des sujets d’actualité.

21 oct. 2019, 12:00
A La Neuveville, une exposition est consacrée à Carl Spitteler, prix Nobel de littérature 1919.

Mais qui donc était Carl Spitteler (1845-1924), injustement oublié? Fallait-il la visite du président chinois, en Suisse, il y a quelques années, pour nous rappeler cet unique prix Nobel Suisse de littérature (1919), excepté Hermann Hesse (1946) qui cependant fut Allemand avant d’être naturalisé Suisse.

Né à Liestal, marié, père de deux filles, décédé à Lucerne, il étudia le droit et la théologie. Cet esprit volontiers voltairien révolté contre Dieu et le destin fut cependant consacré pasteur, mais sans avoir charge de paroisse, précepteur privé durant huit ans à Saint-Pétersbourg. A son retour en Suisse, il enseigna les langues classiques, l’allemand, l’histoire, notamment à La Neuveville, dont le musée d’Art et d’Histoire lui consacre une belle exposition avec manifestation publique le dimanche 27 octobre.

Il fut également journaliste et conférencier et voyagea beaucoup. Son œuvre est fort riche: épopées, romans, récits, poésie, critiques littéraires et musicales. Plusieurs de ses écrits sont traduits en français.

On regrettera, sous réserve d’une étude d’une récente monographie (Stefanie Leuenberger, «Spitteler, un idéaliste très réaliste», éditions Infolio, en collaboration avec l’ACEL, Bienne), le silence des éditeurs suisses en ce 100e anniversaire du prix Nobel décerné à cet illustre écrivain, animé d’un idéal humaniste universel.

Ce livre passionna Freud, lequel considérait Spitteler comme un de nos grands poètes.

Pour combler cette lacune, un grand roman de Spitteler, dans l’excellente traduction de l’époque, de Gabrielle Godet, vient d’être réédité: «Imago» (éditions Soleil d’Encre). Ce livre passionna Freud, lequel considérait Spitteler comme un de nos grands poètes, admiré également par Jung, Nietzsche, Walter Benjamin, Romain Rolland, d’autres encore jusqu’à nos jours. Ce roman reste d’actualité. Le père de la psychanalyse donna le titre d’«Imago» à sa première revue. Quel plus bel hommage?

Si la description des émois intenses de l’amour vécu par le personnage principal demeure centrale et magistralement orchestrée, Spitteler ne se prive pas de dire ses vérités: «Les gens polis sont tous plus ou moins hypocrites (…) Lui un génie? Certes, un de ces milliers de génies avortés comme chaque famille en a un en réserve (…) Les qualités personnelles ne sont pas des armes à longue portée.»

On rappellera également que Spitteler fut parmi les plus farouches opposants à la barbarie de la Grande Guerre. Aussi prononça-t-il, en 1914, un discours d’unité nationale demeuré célèbre: «Notre point de vue suisse».

A découvrir ou à redécouvrir, toutes affaires cessantes!

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