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«Raymond Poulidor cultivait sa popularité auprès de toutes les générations»: la chronique de Richard Chassot

Chaque semaine, un sportif nous livre sa vision de son sport et l’analyse de sa semaine. Découvrez la chronique de Richard Chassot, directeur du Tour de Romandie et consultant RTS.

14 nov. 2019, 19:00
Richard Chassot, directeur du Tour de Romandie et consultant à la RTS.

Avec le décès de Raymond Poulidor, c’est une légende qui s’en va. A l’instar de Ferdy Kübler, en Suisse, il avait cette faculté à rester populaire auprès de toutes les générations. Bien sûr, il cultivait cette notoriété. Mais ça n’a rien d’évident, aujourd’hui, d’être connu et reconnu par les plus jeunes.

Je l’ai évidemment côtoyé lors du Tour de France, chaque été. Mais je n’ai jamais eu l’occasion de partager une soirée avec lui sinon lors d’une arrivée d’étape du Tour de Romandie, un contre-la-montre à Neuchâtel en 2014. Il avait répondu à l’invitation des organisateurs locaux.

Ce qui m’avait frappé, ce jour-là, c’était sa passion du vélo et des coureurs, bien plus qu’à l’espace VIP dont il n’en faisait pas une priorité. Il avait tenu à reconnaître le parcours du chrono; il était fasciné par cette arrivée atypique dans le stade de la Maladière, via une passerelle. Il s’était entretenu avec plusieurs coureurs, Johann Tschopp notamment. Après les présentations d’usage, Raymond Poulidor lui avait demandé comment il envisageait son chrono.

Le grimpeur valaisan lui avait répondu qu’il avait mis un 25 ou un 28 dents sur sa roue arrière. Raymond Poulidor avait alors répliqué, avec son accent du terroir. «Dis donc, petit, si tu veux gagner un chrono, il faut t’arracher les tripes plutôt que de changer de braquet.» C’était le choc des générations. 

 

«Les succès de son petit-fils, Mathieu van der Poel, prouvent que le talent est génétique.»

Raymond Poulidor, c’était un autre cyclisme. Mais ce qui m’avait frappé, c’était qu’il s’intéressait bien plus aux coureurs et aux vélos qu’à tout ce qui entourait une course. Bien sûr, de l’extérieur, on garde l’image d’un champion flanqué de son polo jaune garni du logo du sponsor principal du Tour de France, une banque. C’est paradoxal qu’un coureur qui n’a jamais porté le maillot jaune sur le Tour, une vraie injustice d’ailleurs, l’ait eu aussi souvent sur lui après sa carrière.

En même temps, à son époque, les coureurs ne gagnaient pas grand-chose. Il n’y a rien de déshonorant ou de choquant à ce qu’il accepte d’être rétribué par un sponsor, à signer tant d’autographes et à réaliser des selfies à longueur de journée pour le compte de ce partenaire. Je ne crois pas qu’en ce qui le concerne, cette activité ait pu être dévalorisante ou dégradante. Au contraire, c’était flatteur qu’une marque le considère toujours comme son ambassadeur à plus de 70 ans.

C’est aussi drôle de voir son petit-fils, Mathieu van der Poel, ratisser autant de succès quand lui-même était catalogué, injustement, à la deuxième place. J’adore le contraste et le clin d’œil. C’est la preuve que le talent est aussi génétique, qu’il se transmet d’une génération à l’autre. Le travail, un peu d’ego et un caractère bien trempé, c’est finalement l’ADN des champions.

Raymond Poulidor était présent à Neuchâtel lors de l’arrivée du Tour de Romandie 2014. Photo: David Marchon

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