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Les animaux redonnent vie à la zone contaminée de Tchernobyl

Il y a 30 ans le monde vivait le premier accident nucléaire majeur de son histoire. Le 26 avril 1986, explosait le réacteur 4 de la centrale de Tchernobyl, en Ukraine (alors membre de l’URSS), provoquant une importante fuite radioactive, dont les conséquences sont toujours perceptibles aujourd’hui. Pour marquer cet événement, plongée en 5 volets dans le monde post-Tchernobyl. Ce jeudi place à la faune et à la flore qui ont réinvesti la zone contaminée en s'adaptant à la radioactivité.

12 avr. 2016, 23:30
/ Màj. le 21 avr. 2016 à 11:30
Les chevaux sauvages réintroduits avec succès dans la zone d'exclusion se comptent par dizaines.

La nature possède une incroyable capacité à s'adapter aux conditions les plus extrêmes. Alors que les hommes ont définitivement fui Pripyat, la fameuse ville située aux abords de la centrale de Tchernobyl, d'autres êtres vivants peuplent désormais la zone d'exclusion. Cette vaste étendue de 30 kilomètres autour du site sinistré est devenu un véritable paradis pour la faune et la flore depuis quelques années. Néanmoins, certains animaux gardent un état de santé précaire, quand ils n'ont pas simplement disparu, et les forêts menacent à tout moment de libérer des nuages de particules radioactives.

Retour des grands mammifères

Élans, lynx, ours, chevreuils, cerfs, ou encore loups se sont massivement réappropriés les abords du site nucléaire dévasté depuis plusieurs décennies, alors qu'ils en étaient quasiment absents avant le 26 avril 1986. D'après les conclusions d'une étude parue dans la revue scientifique Current Biology et citée par plusieurs médias, ces mammifères se seraient rapidement remis des effets des radiations. Des décomptes réalisés entre 1987 et 1996 montrent que leurs populations respectives auraient même augmenté à plusieurs reprises. Le nombre de ces animaux serait aujourd'hui semblable à celui des réserves naturelles non contaminées en Biélorussie voisine. Mais, les auteurs de cette étude excluent que cette augmentation soit influencée par d'éventuels afflux en provenance d'autres régions.

 
 

Le site contaminé de Tchernobyl a également été choisi dans le cadre d'un programme de réintroduction du cheval de Przewalski dans les années 1990. À l'instar des autres animaux précédemment cités, les quelques individus de cette race d'équidés sauvages originaire de Mongolie ont vite trouvé leurs marques dans cet environnement a priori hostile. On compte aujourd'hui une centaine de congénères aux abords de la centrale.

 

Dans MotherBoard, Jim Smith, professeur à l'université de Portsmouth, en Angleterre, et l'un des auteurs de l'étude, explique pourquoi la faune s'est développée dans ces conditions pour le moins défavorables. "La faune de Tchernobyl est très probablement meilleure qu'elle ne l'était avant l'accident, et non pas parce que les radiations sont bonnes pour les animaux, mais parce que l'occupation humaine était bien pire."

Disparition des oiseaux et des insectes

En revanche, les invertébrés et les oiseaux qui se nourrissent de ces derniers ont été plus impactés par les retombées radioactives, comme le révèle le National Geographic. Le magazine se base sur les travaux de Timothy Mousseau, biologiste à l'Université de Caroline du Sud (États-Unis), et Anders Pape Moller, chercheur au CNRS (France), qui ont abondamment observé les petites créatures, telles qu'hirondelles, chauve-souris, papillons, araignées et autres rongeurs.

Les deux chercheurs mettent en évidence des fréquences plus élevées de tumeurs et d'anomalies physiques au sein de ces catégories d'animaux. Comme le rapporte le New York Times, ils ont recensé un plus grand nombre de becs déformés chez les oiseaux de la zone d'exclusion que parmi leurs congénères vivant dans des régions dénuées de radioactivité; ils ont également mis en lien le déclin des populations d'insectes et d'araignées avec l'augmentation de l'intensité des rayons ionisants.

 

Certaines cigognes et autres pigeons habitués à la présence des hommes ont presque tous quitté la région en même temps que ces derniers, ainsi que le souligne Slate. Mais, ceux-ci pourraient faire leur réapparition dans peu de temps. En effet, de plus en plus de gens visitent la zone d'exclusion, de quoi bouleverser le fragile biotope au sein duquel les animaux ont appris à vivre durant ces trois dernières décennies où ils étaient devenus les nouveaux maîtres incontestés des lieux.

 

Dangereuse végétation

À Pripyat la jungle urbaine a laissé place à une forêt dense et pérenne. Routes et bâtiments se lézardent sous les coups de boutoir d'une épaisse et vigoureuse végétation, qui ne cesse d'envahir la ville depuis 30 ans. Mais, seules les espèces les plus résistantes sont parvenues à coloniser ces espaces stériles. Les radiations ont ainsi modifié l'écosystème qui prévalait avant l'accident. Les conifères naturellement plus fragiles que les feuillus n'ont pas résisté et ont été remplacés par les bouleaux, tout comme les pins et les vergers, ainsi que le rapporte Le Figaro. La taille des génomes, plus petits chez les bouleaux, expliquerait qu'ils soient moins vulnérables aux rayonnements.
 
Bien que les forêts soit parvenues à s'adapter, il n'en reste pas moins que leur teneur en radioactivité demeure extrêmement élevée. Les organismes vivant dans les couches les plus proches de la surface du sol, tels que champignons, mousses et autres lichens, concentrent ainsi 90% des radionucléides. Certains champignons peuvent atteindre le million de becquerels (Bq), sachant que 100 000 Bq par kilo équivalent à 1000 fois la limite autorisée.
 
De quoi constituer une menace permanente, comme l'explique Philippe Renaud, spécialiste de la radioactivité dans l'environnement à l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), dans les colonnes de L'Express. "Depuis l'accident de 1986, les forêts alentour sont fortement contaminées au césium 137. Lorsque la forêt brûle, cette radioactivité se retrouve en suspension dans l'air et peut alors voyager au gré du vent et des pluies. Si la chaleur de l'incendie est particulièrement forte, alors même la litière, d'ordinaire plus humide, peut s'embraser et libérer de la radioactivité." Selon l'expert, les feux ont d'ailleurs tendance à se multiplier depuis quelques années, car les bois sont de moins en moins bien entretenus dans la zone d'exclusion.
 
Au printemps 2015 justement, un gigantesque incendie avait fait craindre le pire. En dépit d'une concentration trois fois supérieure de particules radioactives dans l'atmosphère, Philippe Renaud se voulait rassurant. "Il s'agit là d'une radioactivité faible, mais visible. On ne peut pas parler d'impact sur la santé publique. Du césium 137, il y en a encore, notamment dans les champignons. A titre de comparaison, il suffirait aujourd'hui d'ingérer 100 grammes de champignons pour avoir une exposition supérieure à celle d'un pompier ukrainien en train de circonscrire l'incendie."
 

 

Retrouvez le 3e volet de notre série ce vendredi 22 avril. Il sera consacré aux films, série TV et autres chansons qui se sont inspirés de la catastrophe de Tchernobyl.

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