«Maman, tu faisais quoi pour gagner du fric quand t’étais petite?» C’est devenu une obsession: mon chérubin a un urgent besoin de pépètes pour s’acheter des Lego. Et évidemment, ça ne peut pas attendre Noël. Sympa, je lui refile mes plans de l’époque pour gagner quelques piécettes. «Avec ta tante, on allait vendanger. On gagnait 3 francs 50 de l’heure.» «Seulement?», s’étonne le petiot. Je précise alors, en me replongeant dans ces souvenirs émouvants: «Ton grand-papa avait gueulé, notre salaire était passé à 4 francs 20.»
Mais le petiot est déçu. Les enfants de neuf ans ne vendangent plus aujourd’hui. D’ailleurs ils sont à l’école quand le raisin est mûr, en septembre. Il insiste pour que je lui donne un autre bon plan: «On organisait des marchés pour vendre les jouets qu’on ne voulait plus.» Séduits par l’idée, mes deux garçons installent une table devant la maison et tentent d’écouler les voitures et autres babioles dont ils souhaitent se débarrasser. Sans succès. «C’est nul, tes plans!», constatent-ils, après plusieurs heures de commerce infructueux.
Ils ne se découragent pas pour autant. Quelques jours plus tard, ils m’annoncent, triomphants, qu’ils ont trouvé un bon filon. Munis de marteaux et de burins, les petits travailleurs s’amusent à extraire du granit d’un gros rocher posé dans le quartier. Après avoir élaboré un solide plan marketing, les bambins et leurs potes décident de vendre chaque caillou brillant au prix de 50 centimes pièce. En quarante minutes, ils récoltent 11 francs, sous le regard médusé de leurs parents, finalement assez fiers que la relève soit plus coriace qu’eux en affaires. Comme quoi, les Lego, ça forge… l’ingéniosité.