Il y a différentes façons de se mettre le doigt dans l’œil. Au propre comme au figuré. Jusqu’à maintenant, j’y voyais surtout l’expression imageant une grosse erreur de jugement. Mais depuis ma décision de passer aux lentilles de contact, j’y découvre un geste. Voire carrément un art.
Les lentilles sont prêtes. L’opticienne l’est aussi. Son professionnalisme et son sourire rassurent. «Je vais tenir votre paupière. Regardez vers le bas. J’approche la lentille…» Son geste est sûr mais… zut.
Quel réflexe débile! Je cligne de l’œil. Une fois, puis une deuxième. «Attendez, je me concentre!» Je cligne encore. Foutue paupière. On change d’œil. Le gauche réagit de la même façon. Toujours très patiente, la jeune femme retente. Même résultat, la paupière redescend et réduit ses efforts à néant.
«Vous pouvez tenter de la mettre vous-même. Parfois, on y arrive mieux», propose-t-elle alors. Tout roule jusqu’au dernier geste. Cette *#/ !#§&* de paupière se referme. «Tenez plus fort.» On tente en changeant de doigt, puis de mains. Une vingtaine d’essais plus tard et autant de conseils avisés, on y est presque. «Ah, vous avez juste fermé l’œil trop tôt!»
La paupière fort irritée, je rends – momentanément, promis! – les armes. Je reprends rendez-vous avec la mission d’ici-là d’entraîner le geste.
Moi qui pensais que ce serait facile. Ben, au final, je me suis bien mis le doigt dans l’œil. Au propre certes, mais surtout au figuré.