Dans leur caddie, s’entasse une collection de tasses et de gobelets marqués d’une gommette rouge, signe d’un rabais canon. Dessous, ces deux clientes ont déjà empilé des dizaines de coussins fantaisie et d’objets de décoration à prix cassés. Dans cette grande surface, les soldes de début d’année battent leur plein.
Les serial shoppeuses passent en caisse. Quelques mètres plus loin, la plus énergique saisit un de ses achats, visiblement surprise. «Oh, il est joli ce verre!» Sa comparse opine du chef tout aussi subjuguée. Tiens, les emplettes à l’aveugle, on ne connaissait pas.
Second magasin. Aux caisses encore, les employés turbinent. A l’un des postes, la file s’étend, les clients se dandinent, grognent et lorgnent de plus en plus fixement sur le couple à l’origine du bouchon. Apparemment, la promo sur la cloche à fromage ne passe pas au scanner. Pendue au téléphone, la vendeuse glisse des sourires encourageants au duo qui ne les lui rend pas. On souffle un bon coup, l’embouteillage risque de durer, il va falloir se montrer patient.
Avec la pandémie de Covid-19, sociologues et psychologues prédisaient une transition vers des modes de consommation plus responsables et plus durables, une conscience sociale et un goût du fait maison aiguisés. Plaisirs coupables, habitudes ou précarité, on est parfois encore loin du compte.