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Eclairage: «Urgence climatique et état de nécessité»

«Le rôle du juge est d’appliquer la loi mais c’est au Parlement de faire celle-ci ou de la modifier», estime Yves Sandoz, professeur honoraire de droit international humanitaire, à propos du verdict émis à l’encontre des militants du climat. Comme d’autres personnalités locales, il est invité à s’exprimer sur des sujets d’actualité.

28 sept. 2020, 19:00
Les activistes du climat Paul Castelain, centre, et Claire Corbaz, droite, ainsi que l'avocate Irene Wettstein, à gauche, réagissent au verdict de condamnation après l'audience pour défendre les douze activistes climatiques.

La parodie de jeunes gens dans une succursale du Crédit Suisse visait à sonner l’alerte sur l’insuffisance des mesures prises pour freiner le réchauffement climatique. Elle fait partie du combat d’une génération qui reproche à la nôtre de n’avoir pas pris la mesure du problème sans même avoir l’excuse de l’ignorance, le premier rapport du GIEC datant de 1990 déjà.

Invoquer «l’état de nécessité» prévu par le Code pénal suisse pour justifier l’occupation d’une banque est toutefois farfelu. Cette disposition vise des cas très exceptionnels, comme celui d’une personne gelée qui force la porte d’un chalet, et ne correspond en rien à la menace du réchauffement climatique qui pèse sur l’humanité tout entière, le moyen utilisé n’ayant, en sus, aucun effet direct pour prévenir celui-ci.

Le rôle du juge est d’appliquer la loi mais c’est au Parlement de faire celle-ci ou de la modifier. La condamnation par l’instance cantonale de recours était d’autant prévisible que l’acquittement reviendrait à ouvrir la porte à l’occupation non seulement de locaux de banques, mais aussi de garages, de boucheries, d’aéroports, sans parler du Parlement, principal responsable d’une action jugée insuffisante.

Dans un Etat démocratique, il faut mobiliser le peuple sans le braquer.

On ne peut dès lors s’empêcher de penser que les avocats ont été les premiers surpris de l’acquittement en première instance, qui a donné à ce jugement un retentissement inespéré au niveau mondial. Et c’est probablement cet écho médiatique peu coûteux, malgré les frais de justice, qui va les inciter à recourir au Tribunal fédéral, voire à la Cour européenne des droits de l’homme, malgré les chances quasi nulles de tels recours. Et tant mieux si cela contribue à la prise de conscience de l’urgence du combat climatique.

Dans un Etat démocratique, il faut mobiliser le peuple sans le braquer. Après le coup de la banque, une bonne manière de le faire ne serait-elle pas, pour ces jeunes gens, d’eux-mêmes renoncer à leur téléphone portable, sachant que l’activité numérique produit plus de gaz à effet de serre que le trafic aérien? Ce serait une bonne manière de démontrer par l’exemple que l’on ne parviendra aux objectifs fixés que si chacun fait de réels sacrifices.

Ce qui n’est pas encore le cas, il est vrai, de celui qui prétend ici donner des conseils.

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