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Eclairage: «Le bonheur, un refuge pour les idiots?»

Des universitaires nous éclairent sur des sujets d’actualité, de société ou de recherche. Aujourd’hui, Gaël Brulé, sociologue à l’Université de Neuchâtel, évoque le rôle du bonheur dans la société.

17 juin 2019, 15:00
Le bonheur a été conceptualisé lors d'Expo.02. Un refuge pour les idiots?, interroge l'universitaire Gaël Brulé.

La dernière décennie s’est accompagnée d’une explosion des livres portant sur le bonheur, la psychologie positive et le développement personnel. Un rapide coup d’œil aux rayons spécialisés suffit pour s’en convaincre. Nous semblons tous en quête de moyens pour être plus heureux, d’autant que la pression pour l’atteindre est de plus en plus forte.

Malgré cet engouement, bonheur et consorts ont néanmoins subi un certain retour de flamme, notamment de la part de celles et ceux qu’on qualifie parfois d’«intellectuels». Chez ces derniers, le bonheur serait bête et naïf, voire idéologiquement dangereux! Alors, pourquoi tant de haine?

Les concepts à la mode changent d’une société à une autre et d’une époque à l’autre. L’accueil d’un sujet dans une société se fait d’autant mieux qu’il est en ligne avec les valeurs de la population et des franges intellectuelles. C’est là que le bât blesse pour le bonheur. Si la population en général semble à la recherche d’outils, de méthodes pour l’atteindre, force est de constater qu’il reçoit un accueil plutôt frileux de la part de certains intellectuels.

Fort heureusement, les études montrent que les moutons que nous sommes se disent moins heureux quand ils sont dominés.

Dans un milieu qui valorise l’esprit critique, la liberté de penser et d’agir, le bonheur apparaît au mieux comme un refuge pour les idiots, au pire comme un outil au service des puissants, notamment dans le cadre de l’entreprise. Cette tendance est particulièrement marquée chez ceux qui analysent la société uniquement à travers le prisme dominant-dominé et pour qui le bonheur n’est qu’un protagoniste de la «société du spectacle».

Selon eux, tout se passe comme si le bonheur était le rideau, l’écran de fumée servant à masquer les rapports de domination. Le bonheur doit-il plaider coupable? Pas si sûr…Fort heureusement, les études montrent que les moutons que nous sommes se disent moins heureux quand ils sont dominés, et que du point de vue du ressenti, l’écran de fumée cache fort mal les mécanismes d’oppression.

Dès lors, si le bonheur devait jouer un rôle dans cette société du spectacle, ce serait davantage celui du public qui nous renvoie un écho positif ou négatif en fonction de si nous jouons juste et bien ou s’il nous faut au contraire envisager un changement de métier, de vie ou de règles du jeu.

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