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Eclairage: «Le bitcoin, outil criminel ou espace de liberté?»

Des universitaires nous éclairent sur des sujets d’actualité, de société ou de recherche. Aujourd’hui, Ulysse DuPasquier, docteur en droit et collaborateur scientifique de l’Université de Neuchâtel, évoque le bitcoin, la monnaie virtuelle.

25 sept. 2019, 17:00
C’est notamment grâce au bitcoin que Wikileaks a pu se financer, lorsque les processeurs de paiement avaient bloqué les comptes de cette organisation.

Le bitcoin est parfois considéré comme de l’or digital. Malheureusement, pour certains, le bitcoin est plutôt l’or des brigands. Il permettrait les pires crimes: blanchiment d’argent, fraudes fiscales, financement d’attaques terroristes… C’est toutefois mal comprendre le bitcoin que de faire un tel raccourci.

Le bitcoin est la première monnaie virtuelle basant son existence, sa masse et son émission sur les sciences mathématiques et informatiques.

Ainsi, il n’existe pas d’Etat ou de banque nationale/centrale contrôlant la création, le transfert et le stockage des bitcoins. Puisque aucune nation n’est en mesure de s’immiscer dans ce processus, le pouvoir est décentralisé, en ce sens qu’il appartient à tous les participants à la blockchain bitcoin, et au consensus ainsi créé.

L’existence et les déplacements de bitcoin sont publics.

Remettre le pouvoir de création et d’échange monétaires entre les mains du réseau d’utilisateurs permet de s’émanciper de toute surveillance étatique, de ne pas être victime d’une politique monétaire toxique et de ne pas être dépendant du bon vouloir d’un établissement bancaire. Ainsi, c’est notamment grâce au bitcoin que Wikileaks a pu se financer, lorsque les processeurs de paiement avaient, sous pression du gouvernement américain, bloqué arbitrairement les comptes de cette organisation.

En réalité, c’est à une problématique bien plus vaste et bien plus ancienne que touche le bitcoin, à savoir le fragile équilibre entre la sphère privée du citoyen et le contrôle étatique ou institutionnel dont il fait l’objet. Il est paradoxal de rejeter l’idée d’un Etat omnipotent, d’exiger le respect de sa sphère privée, de refuser une surveillance et un fichage dystopique, tout en voulant condamner le bitcoin pour l’espace de liberté qu’il procure.

Pour terminer, il faut savoir que chaque transfert de bitcoin est sauvegardé éternellement dans l’archive décentralisée; l’existence et les déplacements de chaque bitcoin sont publics, relativisant l’opacité tant décriée.

Néanmoins, il existe toujours un moyen de paiement, absolument intraçable et entièrement anonyme: les espèces, sonnantes et trébuchantes. Et curieusement, on entend personne s’en plaindre.

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