Votre publicité ici avec IMPACT_medias

Eclairage: «La mort annoncée des actions au porteur»

Des universitaires et des spécialistes nous éclairent sur des sujets d’actualité, de société ou de recherche. Aujourd’hui, Ulysse DuPasquier, docteur en droit, évoque la disparition annoncée des actions au porteur en Suisse.

09 mars 2020, 17:00
Le droit des obligations a été modifié et la fin approche pour les actions au porteur.

Pendant longtemps, le droit suisse des sociétés connaissait la possibilité de posséder la qualité d’actionnaire par la simple détention d’un morceau de papier, appelé «action au porteur». Ce titre était anonyme et garantissait à tout individu présentant ledit titre de pouvoir exercer les droits liés à la qualité d’actionnaire et d’être reconnu comme tel par la société anonyme qui avait émis ce type d’actions.

Il devenait alors difficile, voire impossible pour la société d’identifier ses actionnaires, ce qui menait fréquemment à des imbroglios juridiques. Par ailleurs, de gros problèmes de transparence financière se posaient régulièrement.

La Suisse a ainsi fini par céder à la pression du Groupe d’action financière.

La Suisse a ainsi fini par céder à la pression du Groupe d’action financière (Gafi), organisme international chef de file en matière de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme: en 2015, un premier changement de législation obligeait tout détenteur d’actions au porteur à s’identifier auprès de la société, s’il entendait profiter de ses droits sociaux et patrimoniaux. Les droits liés aux actions au porteur non annoncées étaient suspendus, et ne pouvaient pas être activés de manière rétroactive.

L’étau s’est encore resserré fin 2019, si bien que les actions au porteur sont désormais (et sous réserve de rares cas particuliers) au bord de l’extinction: les sociétés anonymes qui ne sont pas cotées en bourse ont jusqu’au 1er mai 2020 pour convertir leurs actions au porteur en actions nominatives (c’est-à-dire émises au nom de l’actionnaire).

Les détenteurs d’actions au porteur qui ne se sont toujours pas identifiés se trouvent donc dans une situation délicate et doivent impérativement s’annoncer auprès de la société, à défaut de quoi ils seront, à terme, déchus de leur qualité d’actionnaire.

Avec la fin des actions au porteur, la vraie question est de savoir si la société anonyme l’est encore: aujourd’hui, l’anonymat de l’actionnaire n’est, en vérité, plus que le reliquat d’une époque révolue.

En ce qui concerne la société anonyme, un changement de terminologie en «société par actions» pourrait être, à cet égard, judicieux.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias