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Eclairage: «Enseignant: authentique, honnête et humble»

Des universitaires nous éclairent sur des sujets d’actualité, de société ou de recherche. Aujourd’hui, Joachim Sieber, doctorant à l’Université de Neuchâtel et à la Haute école pédagogique de Lausanne, évoque l’école et la neutralité des enseignants.

26 oct. 2020, 17:00
En ces temps de pandémie, des inquiétudes peuvent émerger à propos d’éventuels enseignants complotistes.

Des inquiétudes émergent quant à l’adhésion d’enseignants à des théories conspirationnistes ainsi qu’à la potentialité qu’elles soient enseignées dans les classes, menaçant l’idéal d’une école publique neutre, apolitique, laïque, qui ne transmet que des savoirs objectifs faisant consensus dans les milieux scientifiques.

Or, la science procède à son autocritique, reconnaissant elle-même que les consensus scientifiques sont rares et fragiles et que son objectivité relève du mythe, tout comme celle de l’école ou de l’enseignant.

Historiquement, l’école a été instrumentalisée à de multiple reprise, notamment par l’État et l’économie, pour transmettre des valeurs et des visions du monde pour la démocratie, l’humanisme, le capitalisme, les nationalismes, l’individualisme. Toute pédagogie est fondée en valeurs. Mais ce sont les enseignants qui donnent vie à la pédagogie, transmettant ainsi non seulement certaines valeurs de l’institution, mais aussi les leurs propres.

Souvent fustigée, notre jeunesse mérite plus d’égard et de confiance.

Certains souhaiteraient limiter l’influence de l’enseignant en le réduisant à un simple exécutant des politiques éducatives, lui ôtant toute liberté pédagogique. Le modèle actuel s’oriente plutôt vers une professionnalisation de l’enseignant, lui offrant une formation qui se veut développer une posture réflexive, une éthique professionnelle exigeante, alliant honnêteté intellectuelle et humilité.

Ainsi, lorsque l’enseignant transmet des valeurs, parce qu’il le fait inévitablement, il devrait en être conscient et le faire en toute transparence, explicitant ses sources et ses réflexions, cela en enseignant ces procédures à ses élèves.

L’apprenant est en effet trop souvent oublié, réduit à un simple récepteur à qui l’on transmet un savoir préconstruit. Or, l’apprenant n’est pas passif face aux influences, il est constructeur de son propre savoir.

Souvent fustigée, notre jeunesse mérite plus d’égard et de confiance: elle est capable de discernement, de raison, d’autonomie, cela étant d’autant plus efficace si elle dispose de conditions favorables. L’école offre cela lorsqu’elle accueille l’altérité, les conflits d’opinions et d’interprétations, les jugements de valeur et même les erreurs intellectuelles, afin de les analyser avec méthodes et honnêteté, d’en débattre en toute transparence et laisser chacun se forger sa propre opinion, sans imposer de vérités toutes faites.

La question qui demeure est de savoir qui peut assumer une telle école: des êtres humains animés de valeurs et d’opinions, ou des robots aseptisés?

L’enseignant a une influence non négligeable qui s’accompagne de responsabilités: il répond de ses actes et de ses choix pédagogiques. Si l’on ne peut exiger de lui l’infaillibilité, nous pouvons lui demander d’être authentique, honnête et humble.

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