Votre publicité ici avec IMPACT_medias

Eclairage: «Congo: un travail pascal»

Des universitaires nous éclairent sur des sujets d’actualité, de société ou de recherche. Aujourd’hui, à la veille de la semaine pascale, le théologien Pierre Bühler évoque le travail de deux médecins en République du Congo pour «redresser» des femmes violées.

11 avr. 2019, 14:00
Au Congo, une femme victime d'un viol réconforte son enfant.

Nous sommes au seuil de la semaine de Pâques. S’ouvrant avec l’entrée de Jésus à Jérusalem, elle nous conduit au cœur du drame humain de la souffrance et de la mort. Mais elle nous rappelle aussi l’espérance que la mort n’a pas le dernier mot, que, même si la mort est omniprésente, elle a perdu son aiguillon, comme le dit l’apôtre Paul.

Dans les Evangiles, cette lutte contre l’enfermement de la mort est déjà préfigurée dans les récits de miracles de Jésus. À cet égard, un des miracles les plus parlants nous est raconté dans un petit passage de Luc 13. Rendue infirme par un mauvais esprit qui la possède depuis 18 ans, une femme courbée, totalement incapable de se redresser, attire l’attention de Jésus. Posant ses mains sur elle pour la bénir, il la guérit de son infirmité: «Aussitôt elle redevint droite.» Redresser ce qui est courbé, voilà un signe précurseur du message de Pâques.

La communauté internationale détourne son regard et laisse commettre les crimes.

Ce petit récit de la femme redressée a trouvé pour moi un écho poignant dans un livre qui s’intitule «Réparer les femmes». Il est écrit par deux chirurgiens, Denis Mukwege et Guy-Bernard Cadière, qui soignent depuis de nombreuses années des femmes violées et mutilées à l’est du Congo, dans la région du Kivu. Des hordes militaires et paramilitaires sévissent de manière barbare dans cette région, utilisant les viols et les sévices sexuels comme arme de guerre.

Les affrontements tournent autour de l’extraction du coltan, dont la région détient 60 à 80% des réserves mondiales et qu’on utilise pour la fabrication d’équipements électroniques, en particulier de nos chers téléphones mobiles. Dès lors, la communauté internationale détourne son regard et laisse commettre les crimes dans un silence assourdissant, bien que l’un des deux médecins ait reçu le Prix Nobel de la paix pour son travail.

Sans vouloir faire des deux médecins des figures du Christ, je dirais que leur chirurgie fine est un véritable travail pascal. C’est un esprit de mort diabolique qui possède les hordes de combattants. Ils détruisent les femmes, les enfants, et toute la communauté humaine de la région.
Le travail patient des chirurgiens redresse les femmes. Elles «redeviennent droites», se tiennent debout, même si la lutte contre la mort est loin d’être gagnée.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias