"J'ai paniqué"
«Pause de midi. J'attends à la caisse d'un supermarché. Devant moi, un gars de mon âge avec un soda à la main. Il attend aussi. Il commence à me poser des questions: mon prénom, où j’habite... Je réponds poliment mais sans relancer. C'est son tour. Il paie sa boisson et sort du magasin. Je suis rassurée: les choses vont s'arrêter là. Mais lorsque je quitte à mon tour le bâtiment, je constate qu'il m'a attendue dehors. ‘Et merde’. Je vois déjà le tableau se dessiner.» Alexia* se souvient comme si c’était hier de ce trajet en Ville de Neuchâtel, un simple jour de semaine.
«L’homme commence à me parler et me suit sur le chemin de mon bureau. Je ne me souviens plus du détail de la conversation. Juste qu'il me dit qu'il ferait de moi une princesse. Je lui réponds que ça ne m'intéresse pas. J'essaie de lui faire comprendre qu'il m'impose sa présence et que je n'en ai pas forcément envie. Il se crispe, devient agressif. Je commence à stresser. Je calme le jeu, sans pour autant entrer dans le sien. Je ne veux pas lui donner mon numéro. Il veut voir où je travaille. C'est les vacances et je suis seule dans les locaux. Je ne veux pas qu'il sache où c’est. Mais il ne veut pas me laisser.»
Le stress monte encore d’un cran pour la Neuchâteloise de 30 ans: «On passe à côté d'un bâtiment de l'Université. Alors j'invente un truc: je lui dis que je travaille là-dedans, et que je vais retourner à mon bureau alors que nos chemins se séparent ici. Mais il me répond: ‘Il est public ce bâtiment non? Je peux entrer!’ Je dois de nouveau insister: ‘Non, c'est mon lieu de travail, vous n’avez pas à m'y accompagner et je préfère qu'on en reste là’. Après quelques minutes de négociations – ‘Je veux te revoir. Laissons le destin en décider’ - il semble accepter et s'en va. J’entre dans le bâtiment et erre un moment dans les couloirs. J'ai peur qu'il soit encore dehors. Je veux attendre suffisamment longtemps pour être sûre qu'il soit parti.»
Temps mort. «Je finis par ressortir et me rends vite sur mon lieu de travail, regardant autour de moi pour m'assurer qu'il ne me suit pas. Je monte les escaliers et entre dans mon bureau, que je ferme à clé. Mon cœur bat à toute vitesse. Je me dis que j'exagère, que je panique pour rien. Et pourtant, je n'y peux rien.»
* Prénom d’emprunt