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Thierry Amstutz écrit à nos aînés

Chaque jour, «ArcInfo», ses partenaires médias et les EMS proposent une lettre adressée aux personnes les plus concernées par le Covid-19. Aujourd’hui, Thierry Amstutz, horloger, écrivain et démonstrateur des automates Jaquet-Droz, se souvient de ses grands-parents paternels et maternels.

13 mai 2020, 05:30
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Lettres à nos aînés

Les quatre enfants que nous étions, dressés à la politesse, ne discutaient pas beaucoup avec leurs aînés.

Moi, le deuxième de la fratrie, je ressentais plus d’affection pour les parents de mon père que pour ceux de ma mère, plus éloignés, qui venaient en train d’Allemagne nous rendre visite à Auvernier. Pour accueillir Opa et Oma, la belle table avec les beaux couverts en argent était dressée.

Les arbres bourgeonnaient, les fleurs se paraient de leurs plus belles couleurs et l’air s’embrumait de pollen.

Mes grands-parents vivaient de l’agriculture. Ils habitaient dans le vieux bourg du Landeron, derrière une étroite façade grise, toute en hauteur, qui était le bien de la famille. En hiver, la chaleur des chevaux réchauffait les deux étages supérieurs.

Je n’ai jamais su comment ils s’étaient connus. L’enfant que j’étais ne parlait pas de ces choses-là. Malgré le discret tic-tac de la pendule qui occupait la place d’honneur dans la belle chambre, j’avais l’impression que le temps n’avançait pas, que je resterai toujours en culotte courte et qu’eux n’avaient jamais eu que des cheveux blancs à coiffer.

Comme pour beaucoup, leur vie n’a pas été facile. Mon grand-père est décédé quelques années avant ma grand-mère. Elle s’appelait Emma. Elle l’a rejoint alors que je n’avais pas dix ans.

Ce que j’ai appris, il y a peu de temps, c’est que mon arrière-grand-père lui avait offert un dentier pour son mariage. Pour éviter des infections et avoir de belles dents toute sa vie d’adulte. L’art de soigner les dents étant encore éloigné, il était alors plus sage de les enlever à titre préventif.
A cette époque, ou les chars chargés de légumes tirés par des chevaux s’en allaient au marché, c’était un très beau cadeau et certainement le fruit de nombreuses privations.

Je suis sûr qu’une fois tous les invités sortis de l’église, à la lueur des lanternes et aux sons des violons, elle devait rayonner et danser tard dans la nuit au bras de son jeune mari.

Le balancier de la pendule ne s’arrête pas. Comme nos disparus, il faut toujours s’adapter aux surprises que la vie nous réserve, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Après le confinement, la vie reprendra le dessus mais ne sera probablement plus comme avant. Un nouveau sentiment devrait naître: on sera plus sensible à la présence des autres.







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Ces lettres sont lues dans l’émission de la RTS «Porte-Plume» diffusée du lundi au vendredi de 11 heures à 11 h 30. Une opération en partenariat avec «Le Nouvelliste», «Le Quotidien jurassien», «Le Journal du Jura», «La Liberté», «La Côte» et le mensuel «Générations».

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