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Hôpitaux neuchâtelois face au Covid-19: «La vague est beaucoup plus rapide et intense qu’en mars»

Alors que de nouvelles mesures de lutte contre la pandémie de coronavirus ont été annoncées ce lundi dans le canton de Neuchâtel, le directeur médical des hôpitaux neuchâtelois craint une saturation hospitalière ces prochaines semaines. Interview.

03 nov. 2020, 05:30
Les soignants des hôpitaux neuchâtelois craignent de devoir faire un choix entre les patients si la situation sanitaire continue de se détériorer.

Depuis ce lundi, Genevois et Jurassien vivent à nouveau au rythme du semi-confinement. A son tour, le Conseil d’Etat neuchâtelois a décidé de fermer restaurants, bars et lieux de culture afin de lutter contre la deuxième vague de la pandémie de coronavirus.

De nouvelles restrictions attendues qui interviennent dans une situation sanitaire très tendue: les chiffres des contaminations et les hospitalisations dans le canton atteignent des sommets. Ce lundi à 10h, plus de 115 patients atteints du Covid-19 étaient hospitalisés au sein du Réseau hospitalier neuchâtelois (RHNE), dont 16 aux soins intensifs.

Le directeur médical du RHNE, Olivier Plachta, fait le point sur cette situation inquiétante.

Les hôpitaux neuchâtelois pourraient être parmi les premiers en difficulté au vu du taux actuel d’hospitalisation, bien supérieur à la moyenne suisse.
Olivier Plachta, directeur médical du RHNE

Olivier Plachta, que pouvez-vous nous dire de la situation en Suisse, dans le canton de Neuchâtel et au sein du RHNE actuellement?

Ces derniers jours, la situation sanitaire s’est fortement dégradée en Suisse et dans le canton de Neuchâtel. Notre pays connaît la progression d’hospitalisations la plus forte d’Europe. Les cas positifs augmentent très vite. Et, avec la saturation du système de tests, il est certain que le nombre de cas positifs réels est supérieur au nombre de cas connus.

Malheureusement, notre canton a un taux d’hospitalisation trois à quatre fois supérieur à la moyenne nationale. Avec plus de 130 patients positifs ou suspects, le RHNE a vu le nombre de patients hospitalisés tripler en quelques jours et les entrées à l’hôpital se poursuivent à un rythme élevé au sein de nos services d’urgences.

Pourquoi sommes-nous arrivés à une telle situation?

Les facteurs sont multiples et ce n’est pas l’heure du bilan, qui devra toutefois être fait après la crise. La force et l’agenda des mesures prises pour éviter la progression de l’épidémie, puis la saturation du système de santé, soulèveront des questions au niveau national et des cantons. Au-delà des préparatifs, une certaine insouciance collective va probablement être la source de nombreux drames individuels.

La vague épidémique qui déferle aujourd’hui est beaucoup plus rapide et intense qu’en mars.
Olivier Plachta, directeur médical du RHNE

Comment le RHNE s’est organisé au vu de ce contexte inquiétant?

Le RHNE se prépare depuis la fin de la première vague à une nouvelle flambée épidémique. Des stocks de matériel et de médicaments ont été renforcés, les équipements ont été élargis et une analyse des points forts et des points faibles du dispositif du mois de mars a été réalisée pour y apporter des améliorations.

L’hôpital cantonal a réactivé son dispositif de crise dès le début du mois de septembre, avec pour objectif de maintenir un coup d’avance sur l’épidémie.

Cette période de l’année est traditionnellement chargée pour nous en raison des maladies hivernales. Mais cette année, les besoins sont incomparables avec le nouvel afflux des patients atteints du Covid-19. Et la vague épidémique qui déferle aujourd’hui est beaucoup plus rapide et intense qu’en mars.

L’hôpital cantonal disposera-t-il d’assez de lits?

Une montée en puissance extraordinaire a été préparée. Elle permettra d’accueillir jusqu’à 250 patients atteints du Covid-19, en parallèle à nos 150 lits en soins aigus pour tous les autres patients. Nous avons, par ailleurs, arrêté toute l’activité programmée (ou non urgente) pour en libérer le plus possible. Avec la mise à disposition de lits par des acteurs privés de la santé, il devrait être possible de proposer jusqu’à 80 lits supplémentaires.

Ainsi, plus de dix unités d’hospitalisation dédiées au Covid-19 sont soit ouvertes, soit prêtes à l’être sur les sites de Pourtalès, de La Chaux-de-Fonds et du Locle.

 

L’infographie en grand format

Et les soins intensifs?

La tension est extrême, même si le nombre de lits en soins intensifs a déjà été plus que doublé pour atteindre quatorze lits à Neuchâtel et quatre à La Chaux-de-Fonds, où six autres lits de soins continus sont également présents. Une unité spécialisée de ventilation non invasive forte de quatorze lits est par ailleurs en place à Pourtalès.

Il faut savoir qu’avec 18 lits de soins intensifs pour 178 000 habitants, le RHNE offre un nombre de lits supérieur à la moyenne des hôpitaux comparables.

Les hôpitaux romands se sont mis d’accord pour ne pas activer leurs dispositifs exceptionnels tant que des lits certifiés de soins intensifs sont disponibles dans le réseau romand et national. L’objectif est de préserver le plus longtemps possible la meilleure prise en charge dans les structures disposant de place. Dans cette logique, six transferts de patients en soins intensifs ont été effectués en début de semaine dernière au Chuv (à Lausanne) et à l’Inselspital (à Berne).

Lorsque cette coordination ne sera plus possible faute de places, les hôpitaux activeront leurs possibilités de montée en puissance de lits de soins intensifs. Au RHNE, le dispositif peut monter jusqu’à un maximum de trente lits avec le renfort d’autres professionnels, notamment de spécialistes en anesthésie.

Une progression exponentielle de l’épidémie sur plus de dix à quinze jours pourrait provoquer la saturation des systèmes hospitaliers et l’obligation de devoir effectuer un tri des patients.
Olivier Plachta, directeur médical du RHNE

Au-delà de la quantité de lits, ce sont les ressources en personnel qui sont aujourd’hui cruciales…

L’ensemble des médecins, soignants et toutes les autres professions que compte le RHNE, méritent un soutien inconditionnel à tous les niveaux. Il faut que nous puissions préserver tout notre personnel mis à très rude épreuve durant cette deuxième vague. C’est le seul moyen de pouvoir offrir ce dispositif de soins extraordinaires.

Quelles sont vos plus grandes inquiétudes ces prochaines semaines?

C’est d’assister à la poursuite d’une progression exponentielle de l’épidémie sur plus de dix à quinze jours. Elle provoquerait la saturation des systèmes hospitaliers et l’obligation de devoir effectuer un tri des patients. La fatigue physique et morale du personnel me préoccupe aussi beaucoup.

Que pensez-vous des nouvelles mesures cantonales décidées ce lundi par Neuchâtel?

Notre institution et les professionnels soutiennent ces mesures qui limitent les contacts de manière drastique afin de faire baisser le taux de transmission du virus.

C’est la seule solution pour éviter une saturation que nous redoutons tous, particulièrement dans les cantons les plus touchés. Les hôpitaux neuchâtelois pourraient être parmi les premiers en difficulté au vu du taux actuel d’hospitalisation, bien supérieur à la moyenne suisse.

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