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#2 Les métiers qui font nos médias - Chauffeurs et porteurs, ces travailleurs de nuit

CHRONIQUES DU CHANGEMENT - Ils sont essentiels à la vie de votre journal. Les chauffeurs et les porteurs de “L’Impartial” et “L’Express” n’attendent pas l’aube pour se lever. Nous les avons suivis pour une nuit.

21 nov. 2017, 18:12
/ Màj. le 22 nov. 2017 à 14:03
Les ficeleuses tournent à plein régime dans l'entrepôt pour assembler les exemplaires par trois

Quand la plupart des gens dorment, en plein milieu de la nuit, la lumière illumine un grand hangar de Cortaillod. Il est 1h45 et les 28 chauffeurs préparent la soirée: ils se répartissent les coiffes, les ficeleuses, les caisses...

2h10 - Arrivée du camion

Un cri retentit depuis l’entrée: “Camion”. Et les journaux arrivent. D’abord les éditions du “Temps”, imprimé à Lucerne. Celles de “L’Express” et de “L’Impartial” arriveront un peu plus tard, depuis le centre d’impression de Bussigny.

L’imposant véhicule pénètre à peine dans le hangar que, déjà, tout le monde s’affaire. Les transpalettes se mettent en mouvement et on sort les coupe-ficelles.

Une personne entre dans le camion et tout s’enchaîne selon la mécanique bien réglée. Les ficeleuses fonctionnent déjà à plein régime pour empaqueter les journaux. Il existe différentes tailles de paquets. Les « standards », de 40 journaux, sont destinés exclusivement aux porteurs, pour leur tournée matinale.

Les paquets de trois journaux sont notamment destinés aux cafés et aux kiosques, pour une mise à disposition du client. Enfin, les journaux à l’unité complètent le stock des porteurs pour arriver au bon compte.

Ce matin, je suivrai Monique, une Chaux-de-Fonnière de 57 ans. Devenue chauffeur il y a plus de vingt ans, elle a commencé par faire des remplacements. “À l’époque, ça me convenait bien. J’étais toute seule avec deux enfants, et en travaillant de nuit je pouvais rester avec eux la journée.” Si les enfants ont bien grandi, Monique continue les tournées en voiture dans sa ville.

Chaque chauffeur a ses petites manies. Monique, elle, prépare les paquets avec le nombre exact avant le départ. “On est obligés pour la Chaux-de-Fonds, explique-t-elle. Il faut tout emballer dans du plastique à cause de la neige.”

3h10  - Départ pour la Chaux-de-Fonds

Tous les journaux sont entassés dans la grande voiture de Monique. Elle l’a choisie en fonction du travail.

Car il en faut de la place pour prendre tous les journaux. Pour la tournée du jour, elle a pris 40 standards, 20 paquets de trois journaux et 4 exemplaires à l’unité. Nous partons donc avec 1654 journaux dans la voiture. Monique connaît la route par cœur. Elle la prend tous les jours, sauf les week-ends.

C’est après son divorce qu’elle a dû trouver un travail. La journée, elle coiffe à domicile, la nuit, elle sillonne la ville du Haut. Elles sont deux à se partager le territoire. L’autre femme, c’est sa sœur. Une affaire de famille.

3h40  - Première étape

C’est par -1°C que nous arrivons à La Chaux-de-Fonds. Les premières neiges trônent fièrement sur les trottoirs, laissant la route au verglas. Heureusement, Monique est rompue à ces conditions. Elle emballe consciencieusement les journaux quand le sol est mouillé. “Le seul inconvénient de la neige, c’est qu’on ne peut pas monter sur les trottoirs pour s’arrêter”, explique-t-elle.

La tournée continue et les discussions s’enchaînent. Grande passionnée de moto, Monique est fière d’avoir initié sa fille et son fils. Pour sa petite-fille de trois ans, c’est encore un peu tôt…

Elle enjambe les talus de neige pour aller déposer les paquets de journaux au plus proche des portes. Elle regarde l’heure: tout va bien, nous ne sommes pas en retard. “C’est important, souligne-t-elle. Il y a des kiosques qui ouvrent très tôt et il faut qu’ils aient les journaux dès l’ouverture.” Car les premiers lecteurs peuvent débarquer à tout moment.

Monique lit "L’Impartial" tous les jours. Mais elle attend la fin de la tournée avant d’y jeter un œil. “Parce que ça me ferait perdre du temps dans mon trajet, mais aussi parce que, comme ça, je suis plus tranquille.”

Nous arrivons au rendez-vous prévu avec la porteuse que je vais suivre ensuite, à la patinoire des Mélèzes. Je laisse donc Monique à sa tournée et je suis accueilli par Claudine.

4h45  - La tournée de la porteuse

Le temps de dire au revoir à Monique, Claudine a déjà ramassé ses journaux et commencé sa tournée. “Je l’oublie souvent celui-ci”, avoue-t-elle en parlant de la boîte aux lettres de la patinoire. “Du coup, je dois revenir en arrière”.

Claudine se réveille tous les jours vers 4h. Malgré l’heure, le froid et l’épaisse neige sur les trottoirs, elle avance d’un bon pas. Alors que mes mains bleuissent en écrivant mes notes, les siennes semblent se réchauffer à mesure qu’elle insère les journaux dans les boîtes aux lettres.

Elle connaît son trajet par cœur. Elle vérifie toutefois qu’il n’y a pas de modification de parcours. Cela fait un an ou deux qu’elle a commencé ce travail. Avant, elle était coiffeuse en France. Elle ne regrette pas son ancien métier. “Ça ne me dérange pas. Il faut aimer se lever tôt et marcher le matin.”

Et elle, elle adore ça. “C’est silencieux, quand personne n’est encore levé. C’est très agréable”, lance-t-elle joyeusement. Elle en a de la marche à faire. Elle finira sa tournée autour de 6h30, avant de rejoindre son travail d’aide à domicile chez Nomad.

Je la quitte à 5h30, alors qu’elle arrive au deuxième lieu de dépôt. Elle ramasse le reste de ses journaux alors que je m’apprête à prendre le premier bus pour retrouver mon lit.

Et dans la chaleur du véhicule, assis sur mon siège, j’ai une pensée pour ces chauffeurs et ces porteurs qui bravent le froid. Dire qu’il finissent leur tournée à l’heure où, d’habitude, je me sers mon premier café...

Reportage réalisé par Bastien Lance.

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