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Vernish, le singe qui a du nez

Krassinski s'était signalé il y a deux ans à l'attention des bédéphiles par le très original premier album des «C?urs boudinés»; son histoire du «Singe qui aimait les fleurs» n'est pas moins savoureuse. Depuis qu'Hergé en a fait le héros d'une scène fameuse de «Vol 714 pour Sidney», le nasique est l'un des singes préférés des amateurs de BD. On se souvient que, rencontrant ce singe à long nez dans une île du Pacifique, Allan trouvait que «ce pif» lui «rappelait vaguement quelqu'un», avant de s'apercevoir, au regard noir que lui jetait son «boss», que le quelqu'un en question n'était autre que Rastapopoulos. Krassinski se souvient à l'évidence de cette scène puisqu'il complète la ressemblance du vieux nasique solitaire et misanthrope Koola avec l'adversaire de Tintin en lui prêtant les mêmes sourcils broussailleux. Mais le héros de cet album qui se présente un peu comme un conte à la Kipling, c'est Vernish, que toute la horde trouve ridicule parce qu'il aime les fleurs. Espérant se faire un ami de Koola, qui a été banni (ce qu'il n'apprend que plus tard, croyant d'abord qu'il s'est retiré de son propre gré), il lui trouve, dans un camp de soldats américano-australiens, une boisson qui porte le même nom que lui. Mais le pauvre Koola en devient bientôt dépendant, au point de commettre une imprudence fatale. Vernish trouvera ainsi, en couvrant son cadavre de fleurs, une occasion d'assouvir sa propre passion florale.

22 juin 2007, 12:00

En marge de l'impitoyable guerre que se livrent Américains et Japonais, et dont ils ne voient que les débris - carcasses d'avions et soldats à la dérive - les singes vivent leur existence millénaire, tout aussi impitoyable à sa manière: jeux de pouvoirs, coups bas et exclusions forment la trame de ce récit dont nul personnage, pas même le héros (par trop naïf), n'est vraiment exemplaire et dont on ne sait plus trop s'il nous montre l'image animale de nos sociétés humaines ou les composantes humaines des comportements de nos frères dits «inférieurs». Le dessin anguleux et précis de Krassinski est enrobé de couleurs chaudes qui se fondent dans la lumière dorée d'une jungle emplie de fleurs somptueuses, et l'on se prend à ne plus trouver si disgracieux que cela le nez de ces nasiques qui lui doivent peut-être des bonheurs qui nous sont inaccessibles. / ACO

«Le Singe qui aimait les fleurs», Jean-Paul Krassinski (scénario et dessin), éd. Dargaud, coll. «Poisson-Pilote», 2007
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