Un meurtre serait dû aux pannes de la justice

Un meurtre survenu mi-septembre à Wetzikon (ZH) n'aurait pas eu lieu si l'agresseur, qualifié de dangereux, avait été interné comme l'avait décidé le Tribunal cantonal. Le procureur général a demandé un rapport. C'est l'une de ces suites de hasards ou de pannes de communication aux conséquences tragiques, comme la collision en plein ciel de deux avions à Ueberlingen. Si un tel avait su, si tel autre avait dit, si cette tierce personne avait consulté son fichier électronique? le chauffeur de taxi de 23 ans décédé le 16 septembre à Wetzikon n'aurait pas été poignardé. Mais le jeune homme est mort, et la justice zurichoise se retrouve, une fois encore, sous le feu des critiques, qui montent en puissance depuis une semaine dans les médias et qui se sont déchaînées lundi au Grand conseil.

26 sept. 2007, 12:00

«C'est le juge d'instruction chargé de l'enquête contre le meurtrier, le socialiste Markus Oertle, qui a lui-même dévoilé le problème aux médias», rappelle le professeur de droit pénal et? député cantonal socialiste Daniel Jositsch, pour couper court aux critiques pleuvant sur son parti. Le ministre de la justice, Markus Notter, est en effet lui aussi socialiste.

En l'état actuel des connaissances, l'homme a affaire à la justice depuis 2004 et a déjà été interné. Une expertise psychiatrique, aboutissant à la conclusion de son extrême dangerosité, mettait 14 mois à parvenir, en juillet, au Tribunal cantonal, qui décidait le 23 août de l'interner.

Mais la police n'était pas directement informée, malgré que l'homme fût inscrit dans le fichier de recherche national Ripol (Répertoire suisse des signalements de personnes). Terrible hasard: l'homme est arrêté, pour avoir vandalisé son appartement, mais la police d'Uster ne consulte pas le fichier Ripol, qu'elle ne possède pas dans son intégralité. Soumis à un juge civil, qui ne sait rien des procédures pénales en cours, l'homme est libéré le 7 septembre. Et tue sa victime neuf jours plus tard.

Les barrières de la protection des données ont été avancées pour expliquer les lacunes de communication. Pour Daniel Jositsch, «la législation, trop faible de ce côté-là dans les années 1990, a érigé des barrières trop élevées. Il faut sûrement revenir en arrière, en faisant attention de ne pas abolir toute protection?»

Dans un communiqué, l'UDC a répété hier qu'elle exige une enquête extraordinaire confiée à un juge non zurichois. Le procureur général du canton de Zurich, Andreas Brunner (socialiste), a en effet annoncé hier vouloir examiner «tous les aspects, y compris non pénaux, entourant l'affaire (?) qui pourraient demander des mesures légales ou administratives».

Que les ministres socialistes de la justice soient sous le feu des critiques (meurtre d'une jeune fille par un détenu en permission, du temps de Moritz Leuenberger, agresseur sexuel récidiviste durant une sortie de prison en été 2006 sous Markus Notter et le cas actuel) fait conclure Daniel Jositsch: «C'est malheureux pour les victimes, pas pour le PS, même si on se passerait de cela à quatre semaines des élections. Mais l'application des peines est en soi dangereuse et sensible?» /AGB-La Liberté