Samuel Buri, le peintre des jardins extraordinaires

Le printemps bruisse de toutes les promesses de bonheur à l'espace Courant d'art de Chevenez où l'artiste bâlois Samuel Buri expose jusqu'au 6 mai. Au c?ur de la Haute-Ajoie, non loin de Porrentruy, une galerie rayonne loin à la ronde. L'espace Courant d'art. Un de ces lieux hors du temps fait pour le bonheur. Les anciens de Chevenez l'appellent le «Chété», le «Château» en patois jurassien. Ceint d'un jardin que Monet aurait sans doute aimé peindre, ce vaste espace d'exposition aménagé dans les dépendances d'une ferme des Princes-Evêques de Bâle, accueille jusqu'au 6 mai le peintre Samuel Buri.

15 avr. 2007, 12:00

Après son passage à la Fondation Beyeler en 2005, c'est la première grande exposition de l'artiste, âgé aujourd'hui de 72 ans. L'extraordinaire coloriste présente ses ?uvres les plus récentes: 40 peintures flamboyantes et 60 aquarelles, dont une série d'études baignées des doux soleils d'Andalousie et du Maroc. Nourri de l'expressionnisme abstrait américain en ses débuts, héritier des impressionnistes aussi de par son approche de la lumière à partir de motifs figuratifs, Samuel Buri fit sensation dès les années 1960 en débarquant sur les Champs-Elysées avec ses fameuses vaches de plâtre bigarrées. Il eut les honneurs du Grand Palais, de Beaubourg, du Musée d'art moderne, pour ne citer que Paris où il vécut de 1959 à 1969. Quelque quatre décennies plus tard, le Seelandais, Bâlois d'adoption, reste l'un des peintres helvétiques les plus populaires, notamment en Suisse alémanique.

L'exposition de Samuel Buri marque le 15e anniversaire de Courant d'art. Quinze ans déjà qu'Yves Riat, peintre, sculpteur et graveur, a mis son travail de créateur entre parenthèses pour montrer et défendre les artistes qu'il aime. Rassembleur dans l'âme, c'est en amoureux de son terroir natal qu'il cultive le mélange des genres. Ici, les visiteurs sont accueillis en amis avec «une petite distillée bon pour le c?ur et l'âme». Le «toétché» de Chantal Riat, gâteau à la crème offert au tout-venant, est tout aussi célèbre que les artistes invités. Et ce n'est pas peu dire. La galerie doit son succès à l'exigence de choix artistiques éclectiques, courageux aussi, excluant les «tricoteuses du dimanche». Entendez par là, «les peintres abonnés aux grandes foires artistiques».

Avec l'exposition Buri, Courant d'art connaît désormais un retentissement inespéré outre-Sarine. «Les visiteurs viennent de Bâle, de Zurich, des Grisons, c'est de la folie», jubile Yves Riat. Et notre vieux libertaire ajoulot lâche dans un murmure vibrant de dévotion: «Vous ne devinerez jamais qui était là tout à l'heure... Ernst Beyeler en personne! Jamais je n'aurais imaginé qu'un jour le grand collectionneur, fondateur d'Art Basel, référence mondiale en matière d'art, foule le sol de ma galerie. Beyeler et Buri chez moi, c'est le bonheur! La plénitude d'un rêve.» L'ancien militant du Jura libre s'émerveille de ses amitiés alémaniques. «On est loin des leçons de Roland Béguelin qui nous interdisait de parler allemand. Ici, je me retrouve face à des gentlemen qui parlent parfaitement le français. Nous qui nous targuons d'hospitalité avons beaucoup à apprendre de nos voisins alémaniques.» / CFA

Espace Courant d?art, Chevenez: l?exposition est ouverte jusqu?au 6 mai, les jeudis et vendredis de 16h30 à 18h30; samedis et dimanches de 14h30 à 18h. Accès: autoroute de Porrentruy (A16), sortie «Courtedoux», puis direction Besançon. Infos: www.courantdart.ch