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Des vieilles pierres qui roulent et qui tranchent

Devant une foule record rassemblée samedi sur l'aérodrome militaire de Dübendorf, la bande à Mick Jagger a confirmé son statut de légende électrique avec une incroyable aisance.

07 août 2006, 12:00

Quel est l'album des Stones pr?f?r? de Samuel Schmidt? Le spectateur le plus en vue de la place poss?de-t-il une copie de ?Beggaer's Banquet? ou ne jure-t-il que par les tempos blues et psych?d?liques d'?Aftermath??

Tout en cheminant dans la boue un verre de soda ?vent? ? la main, on tente de se r?chauffer l'esprit avec quelques questions fondamentales du genre: que pense Monsieur le conseiller f?d?ral lorsqu'il ?coute ? fort volume le cocktail de sexe, de drogue et de violence rebelle propos? dans des titres comme ?Brown Sugar?, ?Gimme Shelter? ou ?Street Fighting Man??

Le choc est inou?, d?stabilisant, mais incroyablement jouissif

On n'en saura rien car l'heure de voir en chair et en os ?les momies rock'n'roll? les plus fameuses de l'histoire approche Le bruit d'une explosion et quelques feux d'artifice sonnent la fin d'une attente interminable. L'?cran g?ant qui surplombe la sc?ne gigantesque nous entra?ne en plein cosmos, au milieu d'une pluie de m?t?orites. Il en tombe de partout, le chaos est proche, mais soudain, on aper?oit un vaisseau spatial malmen?. Sur sa carlingue, une langue bien rouge s'?chappe d'une bouche charnue.

Les Stones vont-ils finir d?sint?gr?s comme des vieux pirates de l'espace?

Non! Dans un boucan formidable, ils d?boulent sur la sc?ne tandis que retentissent les accords monstrueux de ?Jumpin' Jack Flash?. Le choc est inou?, d?stabilisant, mais incroyablement jouissif. En quelques secondes, toutes nos pens?es fielleuses sont balay?es par la machine qui tourne ? plein r?gime. On sent le corps qui se vide de toute sa vieille ?nergie, imm?diatement remplac?e par un trouble vertigineux qui nous secoue de la racine des cheveux ? la plante des pieds. La question de l'?ge canonique de Mick Jagger, Keith Richard, Ron Wood et Charlie Watts ne se pose plus. L'?vidence nous arrive en pleine figure: il y a quelque chose de magique et d'intemporel dans cette musique. Les Rolling Stones occupent la sc?ne avec une aisance ?classieuse? qui ressemble ? un avertissement lapidaire adress? ? tous les jeunes groupes qui souhaitent voler leur titre: n'y pensez m?me pas.

A 63 ans, ?Jagga? bouge comme un type de 25 dans sa forme optimale. D?s ?It's Only Rock'n'Roll?, la star tombe la redingote et court, tr?pigne, s'agite, boxe l'air et secoue la foule un peu trop apathique ? son go?t. Le son est monumental, clair (du jamais entendu dans un contexte pareil) et le dialogue ?rudit, g?nial, entre Ron Wood et Keith Richard fait oublier tous les guitaristes bourrins et bavards qu'on doit subir ? longueur d'ann?e lorsqu'on s'int?resse au rock et ? la pop. Sur leurs Fender et leurs Gibson respectives, les deux instrumentistes inventent des riffs, les empilent, les taillent, les d?coupent, les hachent en hommage aux dieux du blues et de la musique noire.

Le graveleux ?Oh No, Not You Again? est ainsi atomis? apr?s voir confirm?e la bonne tenue du r?cent album ?A Bigger Band?. Tir? d'?Emotional Rescue?, ?She's So Cold? montre le groupe sous son jour FM le moins passionnant, mais les accords acoustiques du sublime et drogu? ?Wild Horses? replacent aussit?t le gang dans la course. On pensait s'ennuyer en ?coutant des chansons vid?es de toute leur substance, pourtant le trouble est toujours l?. Apr?s une d?monstration convaincante ? la guitare sur ?Streets Of Love?, Jagger d?cide carr?ment de nous faire pleurer de joie. Le nombril ? l'air, il court d'un bout ? l'autre de la sc?ne tandis que son groupe rejoint par cuivres et choristes joue un ?All Down The Line? poisseux, salement secou? par la frappe binaire de Charlie Watts. A peine a-t-on remerci? le ciel d'avoir donn? l'id?e aux Stones d'extirper ce titre de la fournaise d'?Exile On Main Street? que ?Tumbling Dice?, autre moment chaud du double album mythique de 1972, balaye la foule ? la fa?on d'une coul?e de lave gigantesque. Et pour bien montrer qu'il ne renie rien de sa jeunesse sauvage, le groupe boucle son chef-d'oeuvre avec une version sudiste et non expurg?e de ?(Night Time) Right Time? de Ray Charles.

Une sc?ne mobile

Apr?s cela, les Stones pourraient bien reprendre du Rapha?l ou du Michel Sardou qu'on ne pourrait revoir leur m?rite ? la baisse. Mais ils continuent de nous divertir avec le chuintement du vieux Keith (?Slipping Away?) bombard? chanteur pendant que Jagger va changer de tenue. Sur une sc?ne mobile qui les conduit au milieu de la foule, les quatre comp?res usinent ?Miss You?, ?Rough Justice?, ?Honky Tonk Women? avant de revenir ? leur point de d?part pour une version tribale de ?Sympathy For The Devil? que Jagger, noy? dans les fumig?nes, d?marre seul avant d'?tre rejoint par le reste de la troupe plus mordante que jamais.

Le d?nouement approche S'il s?duit une foule plus avide de son FM que de rythm'n'blues et de country, ?Start Me Up? sonne toujours aussi lourdingue, mais ?Brown Sugar? fait toujours son petit effet de m?me que ?You Can't Always Get What You Want?. Quand ? ?Satisfaction?, il conclut de fa?on pr?visible un show professionnel mais vivant, tendu, chaud et pour tout dire inesp?r?. /JPB-La Libert?

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