« chauffez renouvelable », un programme unique SuisseEnergie

Principal outil du programme « chauffez renouvelable », le conseil incitatif devient gratuit. Cette gratuité devrait permettre à plus de personnes d’être informées et donc sensibilisées à l’importance de passer aux énergies renouvelables pour son chauffage, afin de mieux et moins consommer.

Le conseil incitatif reste le même. Mais il est désormais gratuit (plus précisément il est financé à 100% par la Confédération). Les propriétaires et copropriétaires fonciers pourront se faire conseiller, sans mettre la main au portefeuille, pour bien choisir leur nouveau système de chauffage aux énergies renouvelables. Cette gratuité devrait inciter les particuliers à entamer les premières démarches vers un changement bénéfique à l’environnement. « Je pense et espère que les conseils incitatifs désormais gratuits seront plus nombreux à l’avenir » introduit Jean-Luc Juvet, conseiller incitatif et formateur.

« Il est également intéressant que le tarif et les conditions d’obtention d’un conseil gratuit soient les mêmes dans tous les cantons, poursuit le spécialiste. Auparavant, certains cantons proposaient des subventions ; d’autres non. L’harmonisation à l’échelle du pays est selon moi une très bonne chose. »

De nombreux arguments en faveur du changement 

Le programme « chauffez renouvelable » mise fortement sur le conseil incitatif. Ce dernier correspond à un rendez-vous avec un professionnel, chauffagiste ou ingénieur-conseil en énergie, permettant aux personnes qui envisagent de changer de chauffage de s’informer, pour faire les bons choix. « Les personnes que je rencontre me disent souvent que ces questions d’énergies renouvelables sont des questions compliquées » souligne Jean-Luc Juvet.

Être bien informé est d’autant plus indispensable que l’actualité récente et la situation mondiale font évoluer en permanence le marché de l’énergie. Ainsi, les prix des énergies fossiles grimpent en flèche. « L’augmentation des prix est clairement une incitation supplémentaire forte aux changements » commente Jean-Luc Juvet. Au-delà du prix, les nouvelles législations cantonales interdisent de plus en plus le simple remplacement des chaudières au mazout et au gaz. Enfin, autres paramètres incitant au changement : les craintes sur l’approvisionnement régulier en gaz ou en pétrole et la nécessité de préserver au maximum le climat. Tous ces points sont favorables au recours à des énergies renouvelables, notamment pour se chauffer. 

Dans le cadre du programme « chauffez renouvelable », des professionnels du secteur de l’énergie ont été formés pour pouvoir réaliser des conseils incitatifs. Retour sur ce que peut apporter ce service, désormais gratuit pour les propriétaires suisses, avec Pierre-André Seppey, formateur de conseillers incitatifs et ingénieur chez Physeos. Depuis début avril, les coûts du conseil incitatif sont pris en charge par la Confédération. 

Que pensez-vous de cette récente gratuité ?

Pierre-André Seppey Certains cantons, comme le Valais, finançaient déjà le conseil incitatif. Pour les propriétaires, il est très intéressant de d’obtenir sans frais un conseil aussi neutre que possible afin de prendre la bonne direction. Mais je tiens à rappeler que le conseil n’est pas vraiment gratuit. Il est financé par l’Office fédéral de l’énergie, ce qui n’est pas tout à fait pareil. 

Même si vous n’avez pas encore beaucoup de recul, avez-vous déjà vu les demandes varier avec l’arrivée du conseil incitatif gratuit ?

Disons que nous, conseillers incitatifs, devons être prudents face aux demandes. Nous devons régulièrement rappeler ce qu’est le conseil incitatif. Ces dernières semaines, j’ai reçu des demandes très particulières, techniques et précises concernant la phase de réalisation et qui ne rentraient pas dans le cadre d’un conseil incitatif. Les propriétaires doivent être bien informés sur l’objectif de ce service dédié, sinon ils risquent, au bout du compte, d’être déçus. Par exemple, le conseil incitatif n’abordera pas en détail les problématiques liées à l’enveloppe thermique du bâtiment.

Alors, comment résumer ce qu’est un conseil incitatif ?

Il s’agit d’un conseil de base, qui permet de savoir s’il est possible ou non de passer aux énergies renouvelables pour son chauffage et de connaître les différentes solutions disponibles. Il n’est, par exemple, pas toujours possible de forer dans le but d’installer une sonde pour une pompe à chaleur géothermique ou de trouver la place pour mettre un réservoir à pellets. Tous les types de chauffages ne peuvent pas être installés partout.

Le conseil incitatif est finalement la première étape lors d’une démarche d’installation d’un chauffage à énergies renouvelables…

C’est tout à fait cela ! Le conseil incitatif est très utile pour bien démarrer et se renseigner. Il permet aux propriétaires de découvrir les systèmes à énergies renouvelables existants et adaptés à leur habitation. Côté conseiller, il est l’occasion d’expliquer le processus global et de parler financement. Le professionnel doit aussi aborder le thème important des subventions. Le conseil incitatif doit finalement apporter un éclairage et permettre aux propriétaires et copropriétaires de réfléchir, en amont du changement, à leur système de chauffage. Trop souvent, les personnes attendent le dernier moment. Ils se retrouvent un 6 janvier, par plusieurs degrés en dessous de zéro, à devoir changer leur chauffage en urgence. Et, dans ces conditions, on se tourne rarement vers la meilleure solution. Au contraire, on privilégie la solution la plus simple et la plus rapide, à savoir remplacer l’existant. Un propriétaire informé pourra ensuite aller plus loin dans sa démarche. A la fin d’un conseil incitatif, il sera mieux armé pour choisir le chauffage qui lui convient, aura une idée claire des possibilités techniques et de subventionnement. 

Il est donc important, selon vous Monsieur Seppey, de prendre le temps de la réflexion ?

Oui, c’est essentiel pour faire le bon choix et ne pas le regretter. Pour une nouvelle chaudière par exemple, on s’engage pour 15 ou 20 ans. Les personnes ne se rendent pas toujours compte que leurs choix présents auront des conséquences pendant plusieurs décennies, sur leurs factures comme sur le climat. Nous, conseillers, devons mettre en avant les énergies renouvelables mais aussi aborder des sujets comme l’augmentation du prix du gaz, les questions de déperdition énergétique et la surconsommation. 

Une coopérative nyonnaise composée de douze bâtiments est en train d’être entièrement rénovée, chauffage compris. Elle permettra de réduire de 90% les émissions de CO².

Le projet est d’envergure : douze bâtiments composés de septante appartements à rénover, sans pour autant déloger les locataires. C’est l’un des projets de l’entreprise Impact Living, spécialisée dans l’accompagnement en transition énergétique et écologique. 

Le chauffage n’a pas été le seul paramètre remplacé dans la coopérative nyonnaise (VD). Les équipes se sont en effet préoccupées d’isolation, de production énergétique, de mobilité et de confort. « Ce point est très important dans une rénovation globale », insiste Tobia Wyss, ingénieur EPF chez Impact Living et accompagnateur en transition. La toiture des bâtiments a été changée (assainie puis isolée), des panneaux solaires installés. Plus de cent places de parc ont été prééquipées pour le passage à la mobilité électrique. Tout un réseau électrique a été pensé, afin de proposer une gestion optimisée. Une étude est actuellement menée pour rendre le quartier complètement autonome en cas de blackout.

Quid du chauffage ? 

Côté chauffage, qui était au gaz, certains bâtiments ont été équipés d’une pompe à chaleur air-eau. D’autres d’un chauffage géothermique. « Nos choix ont été guidés, comme toujours, par les caractéristiques propres de chaque bâtiment, explique Tobia Wyss, les avantages procurés par chacune des solutions de chauffage sont variables en fonction de chaque situation. Les différentes options doivent être évaluées et la plus optimale retenue. »

Ce projet montre finalement la réelle faisabilité de la transition écologique, y compris pour de grands ensembles. « Cette rénovation a permis à 300 personnes d’effectuer leur transition énergétique, sans augmentation des loyers » conclut Tobia Wyss.

Quels sont les avantages à passer à un chauffage à énergies renouvelables ? Est-ce qu’un nouveau chauffage plus vert peut réellement changer la donne ?  

« Les systèmes de chauffage renouvelable (chaleur à distance, pompes à chaleur, chauffage au bois, énergie solaire) ont de nombreux avantages : ils respectent le climat et l’environnement, utilisent des énergies indigènes, permettent d’économiser de l’argent et préservent ou rehaussent la valeur des bâtiments » résume dans un communiqué l’Office fédéral de l’énergie.

Ces arguments plaident efficacement en faveur du changement. Ses répercussions sur l’environnement sont concrètes et réelles. Ainsi, en passant d’un système de chauffage au mazout à une pompe à chaleur par exemple, on économise chaque mois autant de CO₂ que ce qui est produit par un trajet de 1000 kilomètres en voiture ! 

Quatre alternatives pour renoncer aux énergies fossiles 

Il existe différentes solutions vertes. Le chauffage à distance est disponible dans un nombre toujours plus grand de communes. Ce système peut utiliser différentes sources de chaleur (bois, eaux souterraines, incinération des déchets, traitement des eaux usées…) et permet d’obtenir tout un réseau de chauffage. Il émet peu de CO₂ et est très confortable pour les propriétaires. Les pompes à chaleur, en vogue, sont simples et peu coûteuses. 

Bien que fonctionnant à l’électricité, elles génèrent trois à cinq fois plus d’énergie thermique. Il est évidemment conseillé que l’électricité utilisée provienne de sources renouvelables, et pourquoi pas du toit, équipé de panneaux solaires, du même bâtiment.

Des énergies renouvelables complémentaires

Le chauffage au bois (granulés – pellets* –, copeaux ou bûches) est lui neutre en CO₂. L’utilisation du bois suisse permet à toute une filière économique locale de fonctionner. Un système de chauffage au bois peut être combiné de façon optimale à un système solaire thermique pour l’eau chaude.

Enfin, l’énergie solaire justement fournit une chaleur sans CO₂. Pour pouvoir en bénéficier, il faut installer des capteurs sur le toit. 

Aussi économique qu’écologique ?

Côté finances, sur la durée de vie totale du système de chauffage (plus de vingt ans), une pompe à chaleur est moins chère qu’une chaudière à mazout. Idem pour l’utilisation du bois ou le recours au chauffage à distance. Changer son chauffage a donc du bon et reste un excellent investissement sur le long terme.