Pour appeler les fidèles à la prière, on utilisait autrefois des crécelles ou des objets similaires. Si la tradition s'est, à de rares exceptions (lire l'encadré) perdue de nos jours, elle perdure encore dans le village d'Epauvillers, dans le Clos du Doubs, où l'on utilise un drôle d'appareil: les caquias. Il s'agit d'une caisse en bois munie d'une manivelle actionnant un mécanisme de lamelles en métal qui soulèvent un à un les six marteaux en bois, selon le principe de la boîte à musique. Ces derniers, en retombant, claquent et résonnent dans la boîte, produisant un son que l'on entend loin à la ronde.
Abandonnée pendant une dizaine d'années, cette tradition a été remise au goût du jour en 1995 par le sacristain Jean Marchand et son épouse Marie-Pierre. Les anciens caquias ayant fait leur temps après des décennies de bons offices, ce sont trois retraités du village, Germain Marchand (le papa de Jean), Rémy Girardin et Joseph Maître - seul survivant aujourd'hui - qui ont fabriqué les nouveaux caquias. Ils se sont inspirés du modèle conçu à Rebeuvelier par le sacristain Ernest Schaller, le père de Marie-Pierre Marchand.
«C'était un ancien coupe choux-raves appartenant à Joseph Maître. Mon papa a soudé des lamelles en métal à la place des dents», se rappelle Jean Marchand. Les caquias sont aujourd'hui bien fixés au plancher tout en haut du clocher de l'église, juste à côté des deux cloches. Une installation qui ne s'est pas faite sans efforts. «On pensait d'abord les mettre près de la minuterie à l'étage en dessous, mais on a dû les monter pour ça résonne mieux», explique Jean Marchand.
Depuis toutes ces années, c'est son épouse Marie-Pierre qui se charge de faire fonctionner les caquias. Entre le Vendredi saint et ce soir, elle va gravir à sept reprises les marches menant au sommet du clocher pour «sonner» l'Angélus à 5h45, à midi et à 20h, sans compter la cérémonie du Chemin de croix, à 10h45 hier. Ces ascensions, périlleuses par endroits, ne lui font pas peur. «Tout pendant que je peux monter, c'est moi qui le ferai», lance-t-elle. Et nombreux sont les fidèles et curieux à attendre à l'aube les premiers sons des caquias. «Tous les Bâlois du village sont là à 6h», plaisante Marie-Pierre Marchand.
Il n'est pas trop tard pour découvrir cette belle tradition perpétuée dans la paroisse d'Epauvillers-Epiquerez. Les caquias résonneront encore aujourd'hui avant de retrouver le silence jusqu'à l'année prochaine. / MMO