Face à cette attaque frontale, la présidente a alors proposé une suspension de séance de cinq minutes et demandé l'avis de l'avocat de la défense. Re-stupeur! Ce dernier a lui aussi sorti la Kalachnikov: «Je suis totalement d'accord avec le ministère public. Envers les accusés, votre attitude est souvent déplorable!»
Femme de poigne, Corinne Suter ne s'est surtout pas laissé démonter par ces Scud. «Très bien, on continue» Une demi-heure plus tard, la juge suivait le procureur à la lettre en condamnant un homme de 70 ans, domicilié à Bassecourt, à cinq mois de prison ferme pour actes d'ordre sexuel avec des enfants, peine suspendue au profit d'un internement dans un établissement spécialisé. L'expert appelé à la barre a estimé que la seule manière d'empêcher ce sinistre individu, récidiviste notoire, de nuire aux enfants - ses premières pulsions sont apparues en 1952! -, c'est d'empêcher tout contact avec eux.
Au terme d'une première audience, le 7 décembre 2005, Corinne Suter avait exigé l'emprisonnement immédiat du prévenu, tout en demandant une expertise supplémentaire. La justice reprochait à l'accusé d'avoir abusé de deux fillettes, à Bassecourt en 2004 et à Courtételle l'année suivante. Au moment des attouchements, les gamines étaient âgées respectivement de 3 ans et 10 mois, de 5 ans et 3 mois. Pénalement, les faits reprochés au pédophile ne sont pas très graves. Mais c'est la personnalité de l'individu qui interpelle.
Car le psychiatre est catégorique: une fois en liberté, l'homme va recommencer son manège et aucune thérapie n'est efficace pour soigner ce genre de malade. Pour arriver à ses conclusions, le psychiatre s'est entretenu une heure et 40 minutes avec le septuagénaire. Le face à face et la confection du rapport ont nécessité 26 heures de travail. Tarif de l'expert: 204 francs de l'heure. Et vas-y pour 5304 balles!
Pour sa défense, le prévenu, qui a toujours nié, a estimé que le psychiatre, d'origine ukrainienne, ne saisissait pas les subtilités du français! Son avocat, sans se montrer convaincant, a plaidé pour l'acquittement. La juge n'a donc étonné personne en prononçant la sanction.
Ni en quittant la salle en ne saluant personne / GST