Port du masque obligatoire, restaurants fermés, unités de soins intensifs pleines: ce que le coronavirus a fait au monde et à la Suisse à partir du printemps 2020 semble bien loin. Pour de nombreuses personnes, la pandémie n’est rien de plus que le souvenir d’une période très étrange et parfois effrayante. Cette semaine pourtant, les personnes présentes dans la salle 005 du Tribunal régional Jura bernois – Seeland ont été catapultées en plein milieu de l’époque corona. Il s’agissait d’une infraction présumée à l’ordonnance Covid-19.

L’ancienne gérante du magasin de village de Douanne a reçu une amende de 1000 francs dans sa boîte aux lettres pour une prétendue infraction, plus précisément le non-port du masque. A cela s’ajoutaient des frais de 300 francs. Mais la femme de 56 ans n’a pas voulu se plier à cette décision. Elle a fait opposition à l’ordonnance pénale du Ministère public et a donc dû se présenter devant le tribunal.

Le masque lui a fait perdre ses moyens

Mais quel crime aurait-elle commis exactement? En octobre et novembre 2021, la police cantonale bernoise s’est rendue à plusieurs reprises dans son épicerie. Selon le rapport de police, la gérante y servait des clients avec son fils – et ne portait pas de masque d’hygiène. Ceci à une époque où le port du masque était obligatoire dans toute la Suisse.

Interrogée par la présidente du tribunal, la propriétaire du magasin de l’époque – qui a transmis l’affaire à un successeur en février dernier – a brossé un tableau quelque peu différent. En principe, elle et son fils auraient respecté l’obligation du port du masque. Au-dessus de la vitrine à fromage et de la caisse, il y avait toutefois une vitre en plexiglas. Et derrière celle-ci, il était acceptable de travailler sans masque.

Il y a eu d’autres situations dans lesquelles la commerçante de Douanne a renoncé à porter un masque. Par exemple, lorsqu’il n’y avait pas de clients dans le magasin. Ou lorsqu’elle devait transporter de lourdes caisses, de la voiture au magasin et jusqu’à la cave. La préfecture lui a d’ailleurs confirmé la légitimité de cette démarche. Aujourd’hui encore, elle souffre d’une toux chronique causée par le port permanent du masque.

C’était très exigeant de travailler pendant neuf heures avec un masque. C’était épuisant.

L’ancienne gérante de l’épicerie de Douanne

«C’était l’horreur»

Après les deux premiers avertissements, la police est passée à l’action en novembre 2021 et a fermé le magasin. Une action qui a ébranlé l’accusée. Elle pensait s’être comportée correctement et ne comprend toujours pas cette action. Elle lutte pour garder son sang-froid lorsqu’elle déclare: «C’était l’horreur.» Après 48 heures, elle a certes pu se remettre derrière le comptoir. Cependant, il y avait des gens dans le village qui ne venaient plus au magasin.

Dans sa plaidoirie, l’avocate de la défense, Isabelle Moeschler, est ensuite revenue sur la pandémie de corona. Elle a rappelé les débuts, lorsque le gouvernement suisse a rejeté les masques comme inutiles, et a cité des études qui ont exploré les effets négatifs des mesures de protection. Et elle a plaidé pour la proportionnalité: la fermeture et l’absence de clients qui s’est ensuivie étaient déjà une punition suffisante.

Mais tous les arguments n’ont servi à rien: la présidente du tribunal a déclaré l’ancienne propriétaire du magasin coupable. Les faits sont clairs, le masque n’a pas été porté à plusieurs reprises dans le magasin. En tant que responsable, l’accusée aurait été chargée de veiller au respect du concept de protection. «Si vous aviez effectivement eu des problèmes de santé à cause du masque, vous auriez pu demander un certificat médical», a déclaré la présidente.

Par intérêt public

La présidente du tribunal a expliqué que le masque aurait également dû être porté derrière la vitre en plexiglas. Avec l’objectif d’empêcher la propagation du virus, il existait un intérêt public à l’obligation de porter le masque. «Ce n’est qu’une légère atteinte à la liberté personnelle et donc acceptable.» L’amende a été réduite de 1000 à 700 francs. Toutefois, les frais de procédure de 750 francs s’y ajoutent, et la femme doit également payer elle-même son défenseur.

Après l’énoncé du jugement, la femme de Douanne s’est montrée stupéfaite. Elle ne peut pas comprendre «une telle injustice». Le jugement peut faire l’objet d’un recours devant la Cour suprême.

Carmen Stalder / Le Journal du Jura

Avoir travaillé sans masque dans le magasin du village coûte cher à Douanne

L’ancienne patronne du magasin du village doit payer 1450 francs pour avoir travaillé sans masque pendant la pandémie.