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«Un militaire spirituel»

Le hallebardier chaux-de-fonnier François Perroset vient de passer plus de deux ans chez les soldats du Vatican. Il évoque ses souvenirs, entre quête religieuse et contraintes de la vie de caserne François Perroset a passé plus de deux ans sous la bannière de la garde suisse pontificale, qui a célébré son 500e anniversaire le 22 janvier. Entré au Vatican en novembre 2003, ce Chaux-de-Fonnier d?origine landeronnaise, âgé de 23 ans, a regagné les Montagnes neuchâteloises à la fin du mois dernier. Calme, posé, d?apparence sereine, d?une agréable urbanité, François Perroset semble pénétré par sa foi et l?amour de la papauté. Nulle trace de fanfaronnade militariste ou d?agressivité guerrière chez l?ancien hallebardier, mais une personnalité sensible et réfléchie marquée par une forte spiritualité. Chez le jeune Chaux-de-Fonnier, le soldat s?efface derrière le fidèle, le militaire laisse la place au croyant, et une affection presque paternelle pour le pape transparaît au détour de chaque phrase. Il faut dire que les 110 gardes suisses vivent tous les jours en quasi-osmose avec le Saint-Père, leur caserne étant située juste sous les fenêtres des appartements privés du chef de l?Eglise catholique. Pour François Perroset, défendre le Vatican et assurer la sécurité du pape ont été des missions militaires, certes, mais qui n?ont jamais étouffé la dimension religieuse et mystique de la fonction. Bilan et impressions d?un soldat de Dieu rentré au pays. / EDA

08 févr. 2006, 12:00

Beaucoup considèrent la garde pontificale comme un reliquat décoratif et un peu folklorique. Comment les convaincre du contraire?

François Perroset: Nous sommes tous issus de l'armée suisse. Nous savons utiliser des armes à feu et nous effectuons régulièrement des exercices de tir, de défense personnelle et de protection rapprochée. Ce qui nous distingue des armées traditionnelles, c'est le port de l'uniforme de gala et l'attachement à la protection du Saint-Père.

Quelle formation avez-vous suivi à votre arrivée à Rome?

F.P.: Au cours du premier mois, les nouvelles recrues recoivent une instruction pratique axée notamment sur le maniement de la hallebarde et l'apprentissage de la marche en section. En parallèle, elles suivent un enseignement théorique consacré à la connaissance du fonctionnement de la garde pontificale et de sa hiérarchie ainsi que des cours d'italien. Enfin, un aumônier se charge de l'instruction spirituelle.

Le garde pontifical aurait-il quelque chose du moine guerrier?

F.P.: Je me voyais plutôt comme un militaire sprituel. D'une part, je devais respecter le système hiérarchique et les contraintes liées à la vie de caserne, comme le contrôle mensuel de ma chambre. D'autre part, j'accordais une importance fondamentale à la spiritualité et à des valeurs telles que l'accueil, l'ouverture ou la tolérance.

Chez moi en tout cas, le religieux l'a emporté sur le militaire, puisque j'ai vécu ma permanence à Rome comme une découverte spirituelle, une occasion d'approfondir ma foi et ma connaissance de la papauté. Quant à la discipline militaire, elle m'a appris la rigueur et l'hygiène de vie.

Le Fribourgeois Stéphane Sapin évoque dans son ouvrage «Garde suisse au Vatican» (2004) la fascination des rondes nocturnes à l'intérieur du palais apostolique. Avez-vous éprouvé le même sentiment?

F.P.: Ces promenades nocturnes sont des moments d'intense solitude. Elles permettent de goûter aux silences et de découvrir des endroits et des oeuvres magnifiques, les détails d'une fresque par exemple.

Quels ont été les moments les plus forts de vos deux ans au Vatican?

F.P.: L'assermentation, qui a eu lieu le 6 mai 2004 dans l'aula Paul VI, la salle des audiences du Saint-Père, m'a procuré une immense joie. C'est une étape solennelle où chaque garde prête serment de fidélité au pape. Dans un autre registre, l'agonie et le décès de Jean Paul II, entre mars et avril 2005, ont constitué des moments d'intense émotion. Face à ces événements tragiques, tous les gardes se sont serrés les coudes et ont fait preuve d'un engagement total. La tristesse provoquée par la disparition de Karol Wojtyla a ensuite fait place à la joie de l'élection de Benoît XVI. La découverte de Rome, une ville riche en histoire et en architecture, est également à mettre au rayon des souvenirs les plus agréables.

Et qu'en est-il des mauvais souvenirs?

F.P.: Les longues heures de garde, les temps de récupération parfois très courts finissent par susciter fatigue et ennui, voire même écoeurement. L'arrachement aux habitudes, les longs mois passés hors du cadre familial sont aussi difficiles à digérer. J'ai ainsi dû attendre huit mois avant de pouvoir regagner La Chaux-de-Fonds.

On imagine dans ce contexte que les loisirs sont une denrée très recherchée?

F.P.: Oui. J'appréciais les activités sportives comme la natation, de même que les visites culturelles et les sorties entre gardes. Le shopping occupait aussi une bonne partie de mes loisirs. A leur arrivée à Rome, la plupart des gardes, un peu honteux de leurs vêtements helvétiques, se précipitent d'ailleurs dans les boutiques de la capitale pour acheter des belles chemises italiennes.

Vous avez connu Jean Paul II et Benoît XVI. Comment avez-vous ressenti leurs personnalités?

F.P.: Jean Paul II était plus jovial, plus détendu et plus accueillant que Benoît XVI. Le pape allemand me semble très doux, un brin timide peut-être. Karol Wojtyla a été un homme d'action, celui qui a contribué à la chute du communisme en Europe de l'Est. Joseph Ratzinger me paraît plutôt l'homme des catéchèses plus profondes. / EDA

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