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Milliers de demandes d'asile en rade

01 sept. 2011, 11:14

L'Office fédéral des migrations (ODM) est sens dessus dessous. Hier, en même temps qu'elle annonçait le licenciement de son directeur Alard du Bois-Reymond (lire ci-dessous), sa ministre de tutelle, Simonetta Sommaruga, a informé le Conseil fédéral, puis la presse, de l'ouverture d'une enquête externe. Celle-ci devra expliquer pourquoi l'ODM a laissé en rade, sans les traiter, 7000 à 10 000 demandes d'asile déposées entre 2006 et 2008 par des Irakiens auprès des ambassades de Suisse en Syrie et en Egypte.

Un ordre de Berne

C'est fin mai que la cheffe du Département fédéral de justice et police dit avoir découvert la pile de demandes d'asile en souffrance, alertée par une personne extérieure à l'administration. Les employés de l'ODM avaient commencé à les traiter en 2010. Simonetta Sommaruga les a stoppés dans leur élan début juillet, dans l'attente, d'ici à la fin de l'année, des résultats de l'enquête externe qu'elle a confiée à l'ancien juge fédéral Michel Féraud.

Selon la conseillère fédérale, le directeur de l'Office fédéral des migrations de l'époque, Eduard Gnesa, avait demandé aux ambassades du Caire et de Damas de transmettre à l'ODM les demandes d'asile qui leur étaient adressées, sans les traiter elles-mêmes. «Nous avons agi en toute bonne conscience», répond laconiquement l'intéressé, qui est depuis 2009 ambassadeur extraordinaire chargé de la collaboration internationale en matière de migrations au Département fédéral des affaires étrangères.

Eduard Gnesa n'en dira pas plus. Mais selon des sources convergentes, la Suisse, submergée par des demandes d'asile d'Irakiens à ses ambassades en Syrie et en Egypte, a convenu, avec d'autres pays, de confier ces personnes aux bons soins du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), qui les a enregistrées et leur a prêté assistance. «Nous pouvons partir du principe que les personnes concernées n'ont pas souffert et qu'elles ont été prises en charge», assure de son côté Simonetta Sommaruga. De toute manière, à l'entendre, les milliers de demandes d'asile émanant de ces Irakiens, dont beaucoup étaient lacunaires et avaient peu de chances d'aboutir, la Syrie et l'Egypte étant à l'époque considérées comme des pays sûrs.

Nos sources ajoutent que s'il avait voulu respecter la loi à la lettre et traiter toutes les demandes d'asile en bonne et due forme, l'ODM aurait dû déployer des ressources en personnel considérables dans les ambassades concernées, alors même que l'issue de la procédure ne faisait que peu de doute.

Qui savait quoi?

Reste une question: qui savait quoi? Ni l'ancien conseiller fédéral UDC Christoph Blocher, qui a dirigé le Département fédéral de justice et police jusqu'à fin 2007, ni Eveline Widmer-Schlumpf, qui lui a succédé à la tête de l'asile, ni la ministre des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey, n'étaient au courant, ont-ils fait savoir à Simonetta Sommaruga. Une version contredite par une source bien placée, qui soutient que Christoph Blocher a forcément dû être avisé. «M. Blocher n'exclut pas d'avoir été informé, mais cinq ans après les faits, il lui est difficile de les reconstruire», répond son chargé de communication, Livio Zanolari. «Christoph Blocher suivait de très près les affaires de l'ODM, il est probable qu'il ait donné des instructions», affirme Denise Graf, d'Amnesty International.

Pour rappel, une demande d'asile peut aujourd'hui encore être déposée dans une ambassade de Suisse. Mais une révision partielle de la loi, actuellement en discussion, prévoit de supprimer cette possibilité.

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