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Les sous-munitions dans le viseur

16 sept. 2011, 10:26

Tristement célèbres depuis la guerre du Vietnam, les armes à sous-munitions devraient être bientôt prohibées par la Suisse. Le Conseil des Etats a approuvé hier la ratification de la Convention d'Oslo, qui interdit l'usage, la fabrication et le commerce de ces explosifs. Fait remarquable, il a pris cette décision à l'unanimité. Lors de la procédure de consultation, l'UDC s'était pourtant opposée à l'interdiction et le PLR avait émis de sérieuses réserves.

Si la Chambre du peuple suit la tendance, la Suisse sera tenue de détruire son stock de sous-munitions dans les huit ans, avec une possible rallonge de quatre ans. «L'emploi des armes à sous-munitions a des conséquences humanitaires particulièrement lourdes», a souligné hier la ministre des Affaires étrangères, Micheline Calmy-Rey. Le tir de ces engins libère un essaim de bombes de petit calibre, qui provoquent des ravages sur plusieurs hectares. Beaucoup n'explosent pas en percutant le sol et sèment la mort dans les populations bien après la fin des conflits.

Convention internationale

L'armée américaine avait fait un usage massif des armes à sous-munitions durant la guerre du Vietnam. Plus récemment, l'Otan en a employé au Kosovo (1999), les Etats-Unis en Irak (2003) et Israël au Liban (2006). Ce dernier conflit a relancé les discussions internationales en vue d'une interdiction, débouchant sur la Convention d'Oslo en 2010. La Suisse serait le 62e pays à la ratifier, alors que 109 Etats l'ont signée mais pas encore ratifiée. Les plus gros producteurs d'armes à sous-munitions - Chine, Etats-Unis, Inde, Israël et Russie notamment - font bande à part.

Les conséquences pour la Suisse? Elles sont loin d'être insignifiantes, car les arsenaux helvétiques regorgent d'armes à sous-munitions. «Il y en a des cavernes pleines», confie en marge du débat le sénateur Bruno Frick (PDC/SZ), président de la Commission de la politique de sécurité. «L'artillerie suisse n'a que ça, en tout cas à 98%.»

Fournisseur israélien

Ces engins ont tous été achetés entre 1991 et 1999 pour 652 millions de francs à la société Israel Military Industries (IMI), qui n'est autre qu'un fournisseur de l'armée israélienne. Selon la loi, l'importation de matériel de guerre ne doit pas contrevenir au droit international et aux intérêts du pays. En l'occurrence, les autorités suisses ont estimé que ces critères étaient respectés, indique Simon Plüss, responsable du dossier au Secrétariat à l'économie.

La Ruag, l'entreprise d'armement de la Confédération, a fabriqué certaines pièces des munitions achetées à IMI, et procédé à leur assemblage. Mais elle n'en a pas exporté, précise le porte-parole, Jiri Paukert.

La plupart de ces armes arriveront à leur date limite de conservation dans les 10 à 15 ans. L'interdiction ne fera donc qu'accélérer leur destruction, prévue intégralement en Suisse. Certains types de sous-munitions resteront toutefois autorisés, comme les armes dites «intelligentes», équipées d'un système de guidage. Lors de la négociation de la Convention d'Oslo, la Suisse avait milité en faveur de ces exceptions.

Reste que certains, au sein de l'armée notamment, font grise mine. Sans sous-munitions, l'artillerie suisse ne sera plus qu'un «taureau castré», admet Bruno Frick. C'est pourquoi le Conseil des Etats a chargé hier le Conseil fédéral de présenter d'ici à fin 2013 un rapport sur l'avenir de l'artillerie. Avec peut-être, à la clé, l'achat de nouvelles munitions.

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