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La recherche nucléaire est en sursis

20 juin 2011, 10:31

La Suisse pourrait sortir progressivement du nucléaire. Suivant le Conseil fédéral, le Conseil national a franchi un pas historique dans cette direction lors de sa session d'été. C'est en septembre que le Conseil des Etats confirmera - ou pas - ce tournant dans la politique énergétique du pays.

Si les sénateurs maintiennent le cap, qu'adviendra-t-il de la recherche sur le nucléaire? Les scientifiques devront-ils abandonne l'atome pour se consacrer à des domaines désormais politiquement plus corrects? Actuellement, la recherche, concentrée presque exclusivement à l'Institut Paul-Scherrer, à Villigen (canton d'Argovie), porte d'une part sur la sécurité des centrales nucléaires existantes et sur la gestion des déchets. D'autre part, la Suisse participe scientifiquement et financièrement au projet Iter, qui vise à la création d'un réacteur d'un nouveau type basé sur la fusion nucléaire (voir encadré).

Ne pas fermer la porte

Conseiller fédéral en charge de la recherche Didier Burkhalter estime que la Suisse devra poursuivre ses efforts sur le nucléaire, même si elle confirme son intention d'en sortir. «Nos cinq centrales actuelles sont là pour un certain temps encore, nous ne savons pas jusqu'à quand.» Pour assurer leur sécurité, il faut donc poursuivre les recherches, soutient le ministre libéral-radical. «La question à se poser est de savoir si nous devons en plus participer à la mise au point d'une nouvelle génération de réacteurs, beaucoup plus sûrs? A mon sens, ce serait bien que la Suisse reste dans le coup», affirme le ministre, opposant présumé à la sortie du nucléaire.

Ne pas fermer la porte à l'évolution de la recherche: c'est exactement la position que défend son Parti libéral-radical. «Nous sommes pour la sortie du nucléaire selon la technologie actuelle», confirme Jacques Bourgeois (PLR/FR), président de la commission de l'énergie du Conseil national. «Mais peut-être disposerons-nous dans 30 ou 40 ans de centrales nucléaires produisant une énergie bon marché et des déchets recyclables, et présentant des risques résiduels minimes?»

Cette porte laissée ouverte y compris par la ministre de l'Energie Doris Leuthard (PDC), pourtant favorable à une sortie progressive du nucléaire, Roger Nordmann veut quant à lui la condamner. «Les recherches en vue de construire de nouvelles centrales appartiennent au passé. Il faut plutôt en mener dans le but de gérer nos épaves nucléaires», dont le démantèlement pourrait d'ailleurs offrir d'alléchantes perspectives économiques selon ce spécialiste de l'énergie au Parlement. L'autre point fort de la recherche nucléaire helvétique actuelle concerne Iter, le projet de réacteur de fusion nucléaire destiné à la production de chaleur, d'électricité et d'hydrogène.

L'espoir de la fusion

Dans le cadre de son partenariat avec Euratom, la Communauté européenne de l'énergie atomique, la Suisse contribue à hauteur de 10 millions de francs par an au réacteur prévu sur le site français de Cadarache, dans les Bouches-du-Rhône. Scientifiquement, le centre de recherches en physique des plasmas de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) apporte sa pierre à ce gigantesque édifice.

En principe, l'engagement de la Confédération court jusqu'en 2013. Et après? Au Parlement, Iter suscite un scepticisme certain chez les opposants au nucléaire. «Quand j'étais étudiant en physique, dans les années 1970, on nous promettait la fusion nucléaire à l'horizon de l'an 2000. Aujourd'hui, on parle de 2050 si tout va bien», ironise ainsi Christian van Singer (Vert/VD). Qui précise néanmoins «ne pas être opposé par principe à Iter». Roger Nordmann s'avère plus catégorique: selon lui, la Suisse doit allumer sa flèche et prendre la voie de sortie d'Iter. «Je ne crois pas que la fusion nucléaire aboutisse dans des délais utiles. Et en matière de sécurité, elle pose d'autres problèmes que la fission, mais tout aussi complexes. Et je rappelle qu'elle dégage également de la radioactivité.»

Le conseiller fédéral Didier Burkhalter maintient malgré toute sa confiance dans la grande aventure scientifique d'Iter: «Pour l'instant, c'est vrai, il n'y a pas de résultat concret. Mais le jour où on en obtient, on résout presque tous les problèmes du nucléaire d'un coup. Objectivement, la fusion présente un tel potentiel qu'on ne peut pas l'ignorer.»

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