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La perle rare qui doit redonner son lustre au Parquet

28 sept. 2011, 10:32

On attend de lui rien moins que de rétablir la crédibilité du Ministère public de la Confédération (MPC) et d'incarner le nouvel organe indépendant voulu par le Parlement. L'avocat et juriste bernois Michael Lauber, qui devrait sauf coup de théâtre être élu aujourd'hui procureur général par l'Assemblée fédérale, n'aura pas la tâche facile.

Ces dernières années, le MPC a été ébranlé par des crises successives. Il y a eu d'abord le conflit entre l'ancien conseiller fédéral Christoph Blocher et le procureur Valentin Roschacher, qui a débouché sur le départ forcé de ce dernier fin 2006. En juin dernier, c'est son successeur Erwin Beyeler qui était éjecté après une série d'échecs en procès. Le Parlement, chargé pour la première fois de l'élection du procureur général, a estimé que l'homme n'était pas à sa place pour conduire un nouveau MPC plus indépendant et plus fort.

Consciente du défi, la Commission judiciaire (CJ) des Chambres a tenu à donner une assise solide au successeur d'Erwin Beyeler. Après avoir auditionné sept prétendants au poste, la CJ a opté à l'unanimité pour la candidature de Michael Lauber, actuel président de l'autorité de surveillance des marchés financiers du Liechtenstein. L'élection de cet avocat de 45 ans, sans affiliation partisane, ne fait donc pas un pli.

Divergences stratégiques

Avant qu'il ne marque son intérêt pour le poste, l'homme n'était pourtant guère connu des parlementaires. Brièvement juge d'instruction dans le canton de Berne entre 1992 et 1993, Michael Lauber a pris dès 1995 la direction de la lutte contre le crime organisé et le blanchiment à l'Office fédéral de la police (Fedpol). Il l'a quittée en 2000 à la suite d'un désaccord sur la réorganisation en cours.

«Les divergences portaient sur la stratégie à suivre. Certaines personnes, y compris Valentin Roschacher (réd: à l'époque haut fonctionnaire de la Police fédérale), voulaient ouvrir le plus d'enquêtes possible. Les autres, dont faisait partie Michael Lauber, préconisaient de mieux étudier au préalable le fonctionnement des organisations criminelles», se souvient Daniel Thelesklaf. Actuel codirecteur de l'Institut de la gouvernance à Bâle, cet expert en criminalité économique dirigeait alors le Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent (MROS), rattaché à Fedpol.

Durant deux ans, il a travaillé sous les ordres de Michael Lauber, avant de quitter son poste à la même période que son chef et pour des motifs similaires. «La situation actuelle du MPC est aussi le résultat de ces décisions stratégiques erronées», analyse Daniel Thelesklaf, qui considère Michael Lauber comme «le meilleur chef» qu'il ait eu dans sa carrière.

Proche des banquiers?

Mais Michael Lauber n'a pas seulement endossé le rôle de «flic» de la finance. Avant de prendre la tête de l'autorité des marchés financiers, début 2010, il a été dès 2004 directeur puis président de l'Association des banques du Liechtenstein. Cette partie de son CV ne fera-t-elle pas peser un soupçon sur son indépendance? «C'est une critique dont il est conscient», affirme le conseiller national Carlo Sommaruga (PS /GE), membre de la CJ. «Vu le respect des institutions qu'il a affiché en commission et sa connaissance des faiblesses du système bancaire, il peut faire de cette proximité un atout.» Selon le socialiste, Michael Lauber a en outre été «un homme clé dans la stratégie de l'argent propre au Liechtenstein». Il faut dire que la principauté était dans la tourmente: en 2008, une affaire de fraude fiscale éclatait après l'achat par les autorités allemandes de données volées à la banque liechtensteinoise LGT.

«Le secret bancaire n'est pas sorti indemne de cette crise», glisse l'UDC genevois Yves Nidegger, membre de la CJ. «Personnellement, ce n'est pas une ligne que je trouve glorieuse ni à suivre. Mais Michael Lauber a une crédibilité internationale en matière de traque du blanchiment.»

L'arrivée d'un nouvel homme, fût-il providentiel, résoudra-t-elle tous les problèmes du Parquet? «Le Ministère public manque encore de personnel doté d'une grande expérience», pointe le sénateur libéral-radical Dick Marty. L'ancien procureur du Tessin estime néanmoins que ce problème de recrutement se résoudra de lui-même lorsque le MPC aura «reconquis son prestige».

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