Votre publicité ici avec IMPACT_medias

L'armée se sent pousser des ailes

15 sept. 2011, 10:54

La campagne électorale donne des ailes à la droite bourgeoise. Hier, le Conseil national s'est prononcé par 108 voix contre 58 en faveur de l'achat de 22 nouveaux avions de combat destinés à remplacer une partie de la flotte vieillissante des Tiger. L'UDC, le Parti libéral-radical et une majorité du Parti démocrate-chrétien (PDC) veulent même que l'armée fasse ses emplettes sans attendre, en puisant dans son budget annuel ordinaire, qu'ils ont d'ailleurs porté dans le même temps à cinq milliards de francs.

Pour le ministre de la Défense, Ueli Maurer, Noël tombe cette année en septembre! A la tribune, le conseiller fédéral UDC a certes défendu hier les options du Conseil fédéral (4,4 milliards de budget annuel, relance de la procédure d'achat lors de la prochaine législature 2012-2015 seulement, pour livraison des appareils entre 2018 et 2020). Mais son manque de combativité ne laissait planer aucun doute quant à ses préférences personnelles.

Un utile plan de relance

La majorité du National ne lui tiendra pas rigueur de ce sens très relatif de la collégialité. A ses yeux, en effet, la Suisse a plus que jamais besoin d'avions pour défendre son espace aérien. Une mission qu'elle doit remplir elle-même, en vertu de sa neutralité, sans recourir aux services de ses voisins.

Aux nécessités militaires, les défenseurs des avions ajoutent des arguments d'opportunité: en achetant dès 2013 des aéronefs sur la base de l'évaluation qu'elle a déjà effectuée, la Confédération pourra profiter de la faiblesse de l'euro face au franc suisse. Et les contre-affaires promises aux entreprises helvétiques par les trois avionneurs qui sont sur les rangs (le Suédois Saab, le Français Dassault et le consortium européen Eurofighter) serviront d'utile plan de relance au moment où la croissance économique donne de premiers signes d'essoufflement, ont insisté plusieurs orateurs.

Ces arguments ont fait mouche. Non contente de l'emporter, la droite a en plus réussi un habile tour de passe-passe. En inscrivant l'achat des 22 chasseurs au budget ordinaire de l'armée, elle évite qu'il soit attaqué par référendum. «Le peuple a été appelé à se prononcer sur deux projets de nouveaux minarets, et il n'aurait pas son mot à dire sur 22 nouveaux avions de combat?», s'est étranglé le Vert Jo Lang (ZG), membre du comité du Groupe pour une Suisse sans armée (GSSA). Les antimilitaristes ne s'en retrouvent pas moins piégés. L'an dernier, ils ont en effet retiré leur initiative populaire «Contre de nouveaux avions de combat» (qui exigeait un moratoire jusqu'en 2019) après que le Conseil fédéral eut lui-même différé l'achat de nouveaux avions, faute de pouvoir se les payer.

Une guerre-éclair

Refusant de s'avouer vaincue, la droite bourgeoise est néanmoins revenue immédiatement à la charge. Et elle a retourné la situation en sa faveur, en juin aux Etats, puis hier au National. La gauche n'a pu qu'assister impuissante à cette contre-attaque fulgurante. Hier soir, le Parti socialiste, amer, agitait le spectre de «coupes sévères dans d'autres domaines d'intervention de l'Etat comme la formation, les transports ou l'agriculture» pour financer les 22 chasseurs. Le conseiller fédéral Ueli Maurer assure que c'est l'armée elle-même qui supportera le poids des économies, non sans ajouter qu'entre l'enveloppe prévue par le Conseil fédéral et celle allouée par le National, la différence n'est que de 200 millions par an.

Si l'acquisition des avions semble désormais acquise sur le principe au Parlement, les deux Chambres doivent encore se mettre d'accord sur le mode de financement, les Etats préférant l'option d'une enveloppe spéciale soumise à référendum facultatif. Quant au GSSA, il pourrait dégainer à nouveau l'arme de l'initiative populaire.

Votre publicité ici avec IMPACT_medias