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Faut-il assouplir les règles en matière de matériel de guerre?

Le Conseil fédéral veut alléger l’ordonnance sur le matériel de guerre. Il serait désormais possible d’exporter des armes vers un pays en conflit armé, pour autant que le matériel ne soit pas utilisé dans ledit conflit. Le conseiller national neuchâtelois Raymond Clottu, membre du groupe UDC, et le conseiller aux Etats jurassien Claude Hêche, PS, en débattent.

05 sept. 2018, 08:00
A Berne, des manifestants ont dénoncé la politique du Conseil fédéral en matière de livraison de matériel de guerre.

Raymond Clottu: «Essentiel»

Oui, mais avec des conditions très strictes. Ce sera toujours le cas avec la modification de l’ordonnance fédérale sur le matériel de guerre. Nous livrons du matériel aux pays qui respectent le droit international et les droits de l’homme. En 2017, les principaux pays destinataires ont été l’Allemagne, la Thaïlande. L’Europe est toujours en tête de nos exportations devant l’Amérique.

Il y a aussi un élément très important. Dans un petit pays neutre, disposer de ses propres bases industrielles demeure essentiel pour sa défense. La Suisse possède un savoir-faire important dans le domaine de la technique de défense. Une politique très stricte et très désavantageuse pourrait mettre en péril notre savoir-faire. Ça mettrait aussi en danger de nombreux sous-traitants, dont une grande majorité de PME qui dépendent du maintien d’une technique de défense, y compris des entreprises neuchâteloises.

Même avec la modification de l’ordonnance, nous aurons toujours la politique la plus stricte par rapport à nos concurrents. Des livraisons dans des pays en guerre comme Syrie ou Yémen ne sont pas possibles. De plus, le matériel de défense, ce ne sont pas seulement des chars ou des munitions mais aussi des composants électroniques de haute technologie.

Je comprends parfaitement que des personnes soient choquées. Mais il va de soi que l’adaptation se fera en accord avec nos obligations internationales. Le risque zéro n’existe pas. Les terroristes n’ont pas attendu l’adaptation de notre ordonnance pour s’armer. Il est très bien que le Contrôle fédéral des finances fasse un contrôle et des remarques, que la transparence soit là. Sur le plan institutionnel, notre système fonctionne bien. L’adaptation de l’ordonnance mérite que les éléments soient clairement définis.

Claude Hêche: «Fausse route»

La volonté du Conseil fédéral d’assouplir l’ordonnance sur le matériel de guerre m’interpelle, et elle doit toutes et tous nous interpeller. En ce qui me concerne, c’est un avis général, soutenir des entreprises du pays, oui. Mais soutenir des entreprises qui portent atteinte au physique et à l’intégrité des personnes, non.

L’ordonnance dit qu’il devrait être désormais possible d’exporter du matériel militaire dans des pays en état de guerre civile s’il n’y a pas de raison de penser que le matériel de guerre sera utilisé dans le conflit en question. De quelle manière va-t-on effectuer des contrôles, conduire une analyse de la situation? Les réponses qui ont été données, en ce qui me concerne, ne sont pas acceptables. Amnesty International et même le CICR ont réagi. Nous ne pouvons pas livrer du matériel de guerre et, ensuite, offrir nos bons offices. C’est totalement contradictoire.

Le Contrôle fédéral des finances soulève également la question des vérifications sur place. Il y a une forme de contournement de la loi par certaines astuces, en utilisant un intermédiaire externe à notre pays, indique-t-il.

La majorité du Conseil fédéral fait fausse route. C’est un très mauvais signal que nous donnons à nos concitoyens, à la majorité de nos entreprises. Le message extérieur vis-à-vis des organisations internationales et d’autres pays, qui sont plus stricts, est aussi négatif.

Dans ma carrière de parlementaire fédéral, j’ai rarement reçu autant de courrier et de courriels. Naturellement, on peut toujours organiser cela. Mais on sent véritablement qu’il y a une réaction d’une très grande partie de la population. Nous avons un potentiel industriel, de ressources humaines, qui montre que nous avons d’autres possibilités, d‘autres produits à exporter que du matériel de guerre.

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