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Expulsion pour les délits graves

29 juin 2011, 10:22

Le miracle n'a pas eu lieu. En dépit du soin apporté à sa composition par Simonetta Sommaruga, le groupe de travail chargé de l'application de l'initiative de l'UDC sur le renvoi des délinquants étrangers s'est heurté aux mêmes problèmes de fond qui avaient conduit les Chambres à préconiser le rejet de l'initiative au profit d'un contre-projet. Résultat: le groupe de travail a accouché hier de quatre variantes dont l'une correspond à la vision de l'UDC et les trois autres à l'esprit du contre-projet rejeté en votation populaire. Le Conseil fédéral tranchera mais l'UDC lance déjà un avertissement: «Si la volonté populaire n'est pas intégralement respectée, nous lancerons une initiative populaire prescrivant au niveau constitutionnel le texte de la législation d'application».

Le 28 novembre 2010, le peuple et les cantons ont plébiscité le texte de l'UDC selon lequel tout étranger qui se serait rendu coupable de certaines infractions ou qui aurait perçu abusivement des prestations sociales serait automatiquement expulsé. Par contre, le souverain n'a pas voulu du contre-projet qui mettait l'accent sur la gravité de l'infraction commise.

La mise en œuvre du nouveau texte constitutionnel laisse apparaître un seul point de convergence: il faudra inscrire dans le Code pénal une nouvelle disposition réprimant la perception abusive de prestations issues des assurances sociales. La peine pourra aller jusqu'à trois ans de prison. Sur tous les autres points, le dialogue entre les représentants du comité d'initiative et ceux de la Confédération et des cantons a tourné court.

Délai controversé

Les émissaires de l'initiative ont défendu une application pure et dure de leur texte. Elle conduit à l'expulsion automatique pour des délits allant du brigandage au viol et au meurtre, indépendamment de la peine prononcée. Les autres membres du groupe de travail ont soumis des variantes qui prennent en considération la longueur de la condamnation. Seules les peines d'au moins six mois de prison pourraient entraîner une expulsion.

«C'est inacceptable. On doit appliquer l'initiative, pas le contre-projet», critique l'ancien secrétaire général de l'UDC Gregor Rutz. «C'est un durcissement par rapport au contre-projet qui tablait sur des peines d'au moins un an», rétorque Heinrich Koller, président du groupe de travail. Pour ce dernier, il faut tenir compte du principe de proportionnalité et ne pas mettre dans le même sac les cas bagatelle et les cas graves. «Si l'on suivait l'UDC, il faudrait expulser un apprenti étranger qui aurait chapardé une bouteille de bière. Même s'il a passé toute sa vie en Suisse et ne parle pas la langue de son pays d'origine.» La majorité ne veut pas non plus déroger à l'accord sur la libre circulation des personnes qui ne permet l'expulsion de ressortissants européens qu'en cas de grave menace contre l'ordre public. Réaction de Gregor Rutz: «Il n'y a pas de contradiction avec le droit international. L'accord avec l'UE laisse aux Etats signataires une large marge d'interprétation».

Plus de 16.000 cas

Chargés de l'exécution, les cantons sont inquiets. «Quelle que soit la variante choisie, la mise en œuvre de l'initiative entraînera une énorme charge supplémentaire pour les autorités pénales, les services de migration et les autorités policières des cantons», souligne Roger Schneeberger, secrétaire général de Conférence des directeurs des départements cantonaux de justice et police. «On peut s'attendre à ce que les intéressés épuisent toutes les voies de recours. Les autorités policières devront en outre exécuter des milliers d'expulsions supplémentaires, avec les mêmes obstacles que l'on connaît déjà sous forme de documents de voyage manquants ou de refus de réadmission par les Etats d'origine.»

Le nombre de personnes concernées est bien supérieur aux chiffres évoqués pendant la campagne. Selon l'Office fédéral de la statistique, la variante UDC aurait entraîné, en 2009, le renvoi de 16 408 étrangers, dont 3183 Européens qui auraient pu en appeler à l'accord sur la libre circulation des personnes. Avec les autres variantes, quelque 3400 personnes sont concernées. Ces chiffres ne tiennent pas compte des abus à l'aide sociale.

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