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Einsiedeln a passé son histoire au peigne fin

28 janv. 2011, 16:15

C'est une première: l'abbaye bénédictine d'Einsiedeln a, entre autres, publié des petites annonces pour retrouver les victimes d'atteinte à l'intégrité sexuelle commise par des moines. Avec succès: près de 40 victimes ont été identifiées.

L'abbé Martin Werlen, responsable de l'abbaye d'Einsiedeln, a pris très à cœur les révélations de la télévision alémanique du printemps 2010 sur des d'atteintes à l'intégrité sexuelle dans les murs bénédictins. Il a confié à une commission externe une enquête véritablement «pro-active» pour rechercher victimes et auteurs de méfaits. Résultat: 24 affaires ont été révélées, concernant neuf moines et une quarantaine de victimes. «Mais le nombre effectif de victimes est sûrement plus grand», a déclaré Pius Schmid, membre de la commission d'enquête. Celui des auteurs devrait en revanche être proche de la réalité. La commission d'enquête a écrit à tous les élèves, actuels et anciens, du gymnase rattaché à l'abbaye. Elle a aussi fait paraître des annonces dans la presse pour inciter les victimes à s'annoncer. L'abbaye a également avisé toutes les paroisses qui lui sont rattachées. Un service d'enregistrement des plaintes et de soutien est en outre en place depuis 1998.

La majorité des cas d'attouchement sur des mineurs concernent les années 1960 et 1970 et sont le fait de trois moines, dont deux avaient été découverts. Sur les 24 affaires mises au jour, 15 relevaient du droit pénal. Sur six enquêtes pénales déclenchées par la plainte d'une victime deux ont abouti à une condamnation et quatre ont été classées. La commission estime que «les responsables de l'époque ont agi correctement avec les moyens à disposition». Ils ont exclu, déplacé ou suspendu les auteurs d'attouchements.

«D'un strict point de vue pénal, la majorité des cas ne peut être considérée comme grave», précise Judith Wild-Haas, avocate et médiatrice, membre de la commission d'enquête. «A une exception près, un cas de violence exercée sur un jeune de 14 ans, ce sont des attouchements. Mais la souffrance des victimes n'en est pas moins grande.»

L'avocate a auditionné les femmes qui ont annoncé leur cas durant l'enquête. Elle cite le cas d'une femme qui a été soudainement agressée par le moine qui lui faisait visiter l'abbaye. «Cela s'est passé il y a 40 ans et elle en est restée traumatisée. Elle n'avait pas osé le dire à ses parents, de peur qu'on l'accuse d'avoir provoqué le geste...» L'abbaye a par ailleurs demandé à chaque victime si elle souhaitait une réparation financière. «Personne n'en a voulu, à part le remboursement de soins médicaux dans une poignée de cas», répond Judith Wild-Haas.

Depuis 1998, l'abbaye a des lignes directrices pour prévenir les abus. Il n'y a plus eu d'agressions depuis, à une exception près, commise par un moine n'ayant pas toutes ses facultés mentales. «Lever le tabou dans ce domaine est la meilleure prévention possible», a déclaré l'abbé Martin Werlen. «Nous espérons que notre exemple inspirera d'autres monastères, mais aussi la société en tant que telle.»

C'est déjà le cas: le couvent d'Ingenbohl, à Brunnen (SZ) a annoncé en décembre la création d'une commission d'enquête indépendante. La Conférence des évêques suisses (CES) salue ces initiatives. «Ces enquêtes vont dans le même sens que le processus de transparence que nous avons initié avec nos rapports annuels», note Laure-Christine Grandjean, porte-parole de la CES, «et nous sommes heureux de son effet boule de neige.» /agi-La Liberté

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