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A l'Est, rien de nouveau

Victoire obligatoire, ce soir, pour la troupe d'Ottmar Hitzfeld. L'équipe de Suisse a pourtant essuyé bien des déboires dans les pays de l'Est.

28 mars 2009, 10:23

«Ils vont se battre comme des morts-de-faim. Si j'étais footballeur moldave, je profiterais de ce match pour me mettre en vitrine. Le football va très vite. Tu brilles une fois et, avec un peu de chance, tu décroches un contrat pro en Belgique ou en Autriche. La Suisse ne va pas gagner 5-0 ce soir. Si c'est le cas, tant mieux, mais on ne va nous dérouler le tapis rouge.»

Alexander Frei sait que l'équipe de Suisse à tout à perdre ce soir, à 17h45, à Chisinau: tout autre résultat qu'une victoire aurait des conséquences funestes sur la qualification pour l'Afrique du Sud. «On sait ce qui nous attend. Notre équipe a déjà voyagé en Géorgie et en Albanie. On retrouve un peu le même contexte ici. Et il faut tenter de faire abstraction de ce qui nous entoure. Un pro ne devrait pas jouer différemment parce que le vestiaire est plus petit ici qu'ailleurs. L'équipe s'est bien acclimatée. La météo, on a vu. L'état du terrain, aussi. Ce ne seront en aucun cas des excuses.»

Voilà pour la théorie. Dans les faits, l'équipe d'Ottmar Hitzfeld n'a jusque-là pas montré les qualités morales et la régularité qui permettent aux grandes nations d'éviter le piège tendu par les sans-grades. Qui plus est, par le passé, les virées dans les pays de l'Est n'ont guère souri à l'équipe nationale. La punition de Bakou (0-1 face à l'Azerbaïdjan en 1996), celle de Moscou (1-4 en 2003) ou, sur terrain neutre, l'élimination aux tirs au but face à l'Ukraine, en huitième de finale du Mondial allemand. L'équipe de Suisse n'apprécie guère le jeu d'échecs qu'impose la discipline tactique des équipes de l'ex-bloc soviétique. Mais pas seulement.

«Que tu le veuilles ou non, c'est plus facile de briller au Stade de France ou à Wembley, plutôt qu'à Chisinau. Seuls les grands sont capables de le faire», appuie Alexander Frei. «Mais dans une carrière, c'est formidable de pouvoir découvrir d'autres choses. Un jour, si j'ai des enfants, je leur parlerai des derbies entre Dortmund et Schalke, mais aussi d'expériences comme celle-ci.»

Au siège de la Fédération moldave de football, on porte sans complexe le costume de l'outsider. A l'image du discours lénifiant du sélectionneur. Bouffi, rougeaud, Igor Dobrovolski (42 ans, ex-Servette et Olympique Marseille) n'a plus grand-chose du virevoltant «Prince Igor» qui faisait vibrer les Charmilles il y a dix-sept ans déjà. Difficile, en l'observant, de l'imaginer prôner un football vif et technique. Installé à l'extrémité d'une table monumentale, encadré de drapeaux et de portraits des gloires locales, il répond aux journalistes, en russe, avec des phrases interminables entre deux longs silences et un phrasé laborieux. Pour commencer: un refrain élimé sur l'équipe de Suisse («bonne techniquement, tactiquement au point», etc...). Un autre sur sa sélection: «A la maison, peu importe le nom de l'adversaire, nous allons jouer sur nos qualités, discipline et agressivité.»

Défait deux fois à domicile par la Lettonie et Israël lors de ces éliminatoires, «Dobro» sait qu'il doit faire profil bas. Qu'il doit miser sur un excès de confiance des Suisses. Alors il en rajoute. «Nous n'avons pu nous entraîner qu'une seule fois cette semaine à cause des inondations», ou encore «les clubs moldaves ou russes ne jouent pas le jeu de l'équipe nationale». Qui sortira vainqueur de ce petit jeu de dupes?

Côté suisse en tout cas, on égrène le chapelet d'inspiration luxembourgeoise depuis le début de la semaine: ne snober personne, ne snober personne, ne snober personne... «Après nos deux victoires contre la Lettonie et la Grèce, on a su redresser la barre», poursuit Alex Frei. «Cela dit, on relève souvent notre supériorité intrinsèque sur la Moldavie. Tout ça ne sert à rien sans rigueur et sans combativité. Et eux, ils vont battre comme si leur vie en dépendait. A domicile, la Moldavie sera dure à prendre. Le match aller sera bien plus compliqué que le retour, mercredi à Genève.»

Les conférences de presse sont terminées. Le capitaine Frei quitte la grande salle de l'hôtel Leogrand de Chisinau d'un pas décidé et s'engouffre dans l'ascenseur. A l'autre bout de la ville, Igor Dobrovolski quitte le siège de la Fédération moldave d'un pas nonchalant et s'allume une cigarette. /VIC

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