Usain Bolt reste unique et époustouflant. Même sans être au top de sa forme, il a signé avec ses coéquipiers de la Jamaïque un record du monde du relais 4 x 100 m (37''04) aux Mondiaux de Daegu, au lendemain de sa démonstration sur 200 m. De quoi éclabousser de sa classe des joutes riches en révélations et grandes performances.
En huit jours, Bolt a fait oublier sa disqualification du 100 m, qui avait plombé l'ambiance en ouverture. La façon dont le triple champion olympique et désormais quintuple champion du monde a évacué l'incident démontre l'étendue de ses ressources physiques et psychologiques.
Hier, sa dernière ligne droite sur le relais a été un modèle de puissance et de fluidité. Magnifiquement lancé par Nesta Carter, Michael Frater et Yohan Blake, Bolt, alias «Lightning» (La Foudre), a mis un point d'honneur à aller chercher le record. L'ancienne marque, qui datait des JO de Pékin, est améliorée de 6 centièmes. Et dire que la Jamaïque était privée de deux de ses trois meilleurs sprinters, Asafa Powell, blessé, et Steve Mullings, suspendu!
«Je voulais juste courir vite, et on l'a fait», lâche Bolt. «Je suis fier de mon équipe et content de moi-même. J'avais un peu mal aux tendons d'Achille, c'est la raison pour laquelle j'ai fait le dernier relais, mais Yohan Blake a été grand dans le virage.»
Le quatuor des Caraïbes s'est imposé avec une avance invraisemblable de 1''16 sur la France de Christophe Lemaitre, 2e en 38''20. Les St-Kitts-et-Nevis du vétéran Kim Collins conquièrent le bronze en 38''49. L'Italie finit 5e en 38''96, un chrono bien en deçà du record de Suisse (38''69), de quoi aviver les regrets du relais helvétique. Les Etats-Unis ont une nouvelle fois été éliminés, Darvis Patton ayant trébuché au moment de transmettre à Walter Dix.
Cette nouvelle démonstration de la Jamaïque et de Bolt en particulier a fait de l'ombre aux autres résultats hier, pourtant extraordinaires. L'étudiant américain Christian Taylor, 21 ans, a pulvérisé son record pour décrocher l'or au triple saut avec la quatrième performance de l'histoire (17m96).
Le 800 m dames a connu deux gagnantes: la Russe Mariya Savinova (1'55''87), mais aussi la Sud-Africaine Caster Semenya, heureuse de sa médaille d'argent. «J'apprécie bien plus cette médaille que mon titre il y a deux ans. Je me sens bien mieux dans ma peau», relève Semenya, dont le genre sexuel continue de faire débat bien qu'elle semble acceptée par ses pairs.
Le champion d'Europe britannique Mo Farah a fait prévaloir son finish pour remporter le 5000 m (13'23''36) une semaine après sa médaille d'argent sur 10 000 m. Les Kényans n'ont pour une fois pas eu leur mot à dire. Le 4 x 100 m dames a permis aux Etats-Unis de rafler une 12e médaille d'or (41''56) et à Allyson Felix de glaner une quatrième «breloque» (dont deux fois l'or en relais).
La veille, les grandes dames de la hauteur, Anna Chicherova qui s'est imposée devant Blanka Vlasic, et le temps canon de l'Australienne Sally Pearson sur 100 m haies ont constitué, à côté du 200 m remporté par Bolt (lire par ailleurs), les moments forts d'une riche soirée. En 12''28, l'explosive Australienne Sally Pearson s'est approchée à 0''07 du record du monde de la Bulgare Yordanka Donkova, vieux de 23 ans.
Un autre record du monde détenu par une Bulgare pourrait tomber d'ici un an ou deux. La Russe Anna Chicherova a montré être prête à s'attaquer aux 2m09 de Stefka Kostadinova en décrochant un premier titre mondial avec 2m03, devançant au nombre d'essais Blanka Vlasic. La Croate, qui avait failli renoncer à ces joutes à cause d'une blessure au genou gauche, franchit pour la 100e fois de sa carrière 2m ou plus mais perd sa couronne. Jeune mère, Chicherova affirme que sa maternité a changé sa vie: «La naissance de ma fille m'a donné confiance et un esprit conquérant.» Ça promet. / si