CRITIQUE -
PAR JERÔME JEANNIN
Entre les acteurs et le public, le rapport est frontal: le ton est à la confidence. Le spectacle est inspiré de témoignages recueillis par les Chaux-de-Fonnières Francine del Coso et Catherine Meyer. En entrant dans la salle, les spectateurs découvrent les comédiens assis sur un très long banc, qui occupe toute la largeur de la scène. Nous sommes dans un EMS. Tandis que les personnages se racontent des histoires au premier étage, deux solitudes s'affairent en silence au niveau supérieur, sans se voir ni s'adresser la parole.
Puis les personnages reviennent séparément pour se confier et s'essayer à un tour de chant. On parle de vacances et d'insomnies. De la faim qui s'en va. Pourquoi vit-on si vieux? On fredonne Johnny, Brassens, Sarclo, Bourvil et son bal perdu au rythme des cuillères secouées dans les tasses de thé
Surprise: un vieil acteur qui s'est oublié dans sa loge sort de la pénombre pour répéter son rôle de macchabée. C'est le Svetlovidov du Chant du cygne de Tchekhov! Il sera suivi un peu plus tard par le roi Lear de Shakespeare, autre vieux fou de légende, toujours en lutte contre les vents déchaînés
La dernière partie évoque des thèmes graves: la perte de la mémoire, l'envie de s'en aller, Alzheimer. Les phrases n'atteignent pas toujours leur terme, les silences se font de plus en plus parlants. Avant le noir, les blancs. On parle d'amour avec humour: «Il faudrait que le bon Dieu trouve une combine pour que les couples puissent partir ensemble... Ceux qui s'entendent bien!» On ose le mot tabou: la mort «dont on ne parle pas assez». Et si on parlait plutôt d'apaisement, voire d'aboutissement? Encore quelques tintements de xylophone et le noir peut arriver, et avec lui la sérénité.
«Et si demain »: à découvrir encore les vendredis 19 et 26 juin, les samedis 13 et 27 juin à 20h30, le jeudi 25 juin à 19h et les dimanches 14 et 21 juin à 17h à la Grange aux concerts, à Evologia-Cernier. Réservations au 032 889 36 05