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Deux musiciens en parfait équilibre

30 août 2010, 08:09

La charmante église d'Engollon accueillait samedi et hier matin, dans le cadre des Jardins musicaux, les deux musiciens neuchâtelois Sébastien Singer, violoncelle, et André Fischer, guitare. Que de complicité entre ces deux artistes! Dans la «Sonate pour arpeggione et piano» de Schubert (transcrite pour guitare par André Fischer), le violoncelliste prend le temps d'architecturer chaque phrase. Son instrument chante avec lyrisme. L'accompagnement du guitariste est souple et puissant et met en exergue les glissements harmoniques schubertiens. C'est dans le mouvement lent que les deux musiciens trouvent l'équilibre le plus parfait devant un public recueilli.

Les valses poétiques de Granados, dans une transcription des deux musiciens, dégagent une sensualité nostalgique et contenue. Cette version pour violoncelle et guitare offre une inépuisable variété sonore: cordes pincées qui passent insidieusement d'un instrument à l'autre, harmoniques qui se mêlent dans une richesse de timbres sans cesse renouvelée. Rubatos et respirations sont parfaitement maîtrisés. Deux tangos de Piazzola complétaient le programme. L'âpre expressivité de ces compositions est magnifiquement rendue par le duo.

Vendredi soir, le concert intitulé «Cris» a proposé de larges extraits des «Espaces acoustiques» de Gérard Grisey. Nous assistons à la genèse d'un son, d'abord énoncé dans sa plus simple expression avant de couvrir, en vagues successives, le large champ des harmoniques naturelles. L'altiste Tomoko Akasaka (photo sp-Pierre-William Henry) livre ici une magnifique interprétation du «Prélude» qui évoque, en de nombreux aspects, la démarche de Giacinto Scelsi. La direction souple et précise du chef d'orchestre accompagne dans un second temps la mise en abîme de l'espace sonore: inexorablement, la microtonalité glisse vers le bruit et la saturation orchestrale. Lorsque le processus atteint son point de tangence, les instrumentistes divulguent les contours d'un nouveau territoire - celui de l'inouï, lyrique et ô combien émouvant.

L'½uvre de William Blank, «Cris», évoque le massacre de Srebrenica. Dans le tissu des sonorités sombres de l'orchestre, le long monologue du pianiste Benjamin Kopp parcourt l'infini d'une douleur encore vive. Les tourments se résolvent dans une ultime résonance.

François Cattin a présenté samedi sa dernière composition, «Les aveugles». Cette action poétique, écrite pour trois voix solistes, ch½ur d'enfants et groupe instrumental, mêle l'imaginaire, le fantastique à la forme de la messe. Il s'agit, esthétiquement, d'accomplir un parcours initiatique qui mène le spectateur au c½ur de l'indicible, aux frontières d'un état extatique. Les textes exhortent ainsi à se déprendre du réel et, lentement, à faire l'épreuve d'une nuit obscure et sonore. Guidés par la mise en scène de Stephan Grögler et par les lumières d'Alain Kilar, les jeunes chanteurs du Conservatoire sondent les replis d'une langue complexe. Finalement, l'innocence n'aurait-elle pas le pouvoir d'entrouvrir les portes du mystère?

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