«Sans nos racines, nous ne sommes rien que des épaves aux vents des modes.» C’est en ces termes que Michel Egloff décrivait, lors de sa leçon d’honneur à l’occasion de sa retraite en février 2007, la nécessité de l’archéologie. Fondateur du Laténium, ancien directeur du musée, archéologue cantonal et professeur à l’Université de Neuchâtel, ce spécialiste de la préhistoire est décédé ce jeudi 29 juillet à l’âge de 80 ans, «après quelques mois de maladie affrontée avec sérénité», écrit l’Université dans un communiqué.

Après des études à l’Université de Lausanne et à la Sorbonne, à Paris, Michel Egloff a récolté de nombreuses marques de reconnaissance au fil de sa carrière: officier dans l’ordre des Palmes académiques, lauréat du prix de l’Institut neuchâtelois, titulaire de la médaille de la médiation archéologique de l’Union internationale des sciences préhistoriques. Il a connu la consécration en 2003, lorsque le Laténium s’est vu décerner le Prix du musée du Conseil de l’Europe.

Meneur-né

«Sa grande force était d’arriver à faire des liens entre les choses, il était capable de glisser d’un objet à l’autre grâce à l’immense richesse de sa culture», raconte Marc-Antoine Kaeser, actuel directeur du Laténium et professeur titulaire à l’Université de Neuchâtel. «Il mettait l’archéologie en dialogue avec d’autres disciplines.»

«Meneur-né», Michel Egloff «avait une très forte autorité. Il était capable d’être assez cinglant, mais toujours bienveillant», se rappelle Marc-Antoine Kaeser.

200 millions pour l’archéologie neuchâteloise

Ses exceptionnelles qualités en matière de négociation et son habileté diplomatique ont permis de débloquer, sur plusieurs décennies, 200 millions de francs pour l’archéologie neuchâteloise, notamment pour les fouilles lors des chantiers autoroutiers. «A la fin des années 1960, l’archéologie n’était pas professionnalisée, à part pour quelques postes à responsabilité. Lui a réussi à obtenir des salaires pour les fouilleurs, ce qui a permis de faire venir à Neuchâtel des gens très qualifiés.»

Ainsi, «tous les grands noms de l’archéologie française ont commencé leur carrière à Neuchâtel», raconte le directeur du Laténium. «Au début des années 1980, il y avait davantage d’archéologues à Neuchâtel que sur l’ensemble du territoire français.»

Vocation précoce

La vocation de Michel Egloff pour la préhistoire remonte à sa prime enfance, ainsi qu’il le racontait en 2006, lorsque lui furent remises les Palmes académiques. Lorsqu’il avait 6 ans, le petit Michel avait suivi son père instituteur et sa classe dans la forêt des Monts-de-Corsier, au-dessus de Vevey. Un orage avait contraint cette petite équipe à se réfugier dans un abri-sous-roche, comme les hommes des cavernes. Et son père avait lu des passages de la «Guerre du feu» de Rosny Aîné.

Marc-Antoine Kaeser relève encore le goût de son prédécesseur pour les contrepèteries et l’humour. Pince-sans-rire, Michel Egloff avait eu ces mots lorsqu’il avait reçu les Palmes académiques: «Le simple appointé que je suis dans l’armée suisse est devenu en un instant officier. Ça fait partie des miracles extraordinaires de la vie!»

Une amphore vieille de 2000 ans retrouvée près de Bienne

Les archéologues bernois sont tombés récemment sur une amphore enfouie dans les sédiments de l’ancienne Thielle, non loin de Bienne. Le contenant a près de 2000 ans.