«This is Switzerland reggae», braillait, il y a quelques lustres, Bernie Constantin. Si la musique jamaïcaine est un peu passée de mode, le bon vieux rock'n'roll a toujours la cote.
La Suisse est l'eldorado des festivals et abrite peut-être le plus extrême d'Europe: le Greenfield, à Interlaken. Korn, Slipknot, Billy Talent, Trivium, August Burns Red, on en passe et des plus bruyants, se succèdent à un rythme effréné pendant trois jours. Le public est à la hauteur: rangers, têtes de morts, cuirs cloutés, la panoplie parfaite du métalleux modèle.
Seulement voilà, les crêtes rouges ramènent consciencieusement leurs bouteilles en PET avec le petit jeton y afférent, les campeurs repartent avec leur sac-poubelle et les méchants rockeurs respectent à la minute près l'horaire des concerts... On est quand même en Suisse allemande!
Changement de décor. Montreux et son festival, guindé, cher, élitiste.... Peut-être. Mais où Sweet Georgia Brown, plantureuse chanteuse de blues sauvée du métro, fait trembler l'Auditorium Stravinski bien au-delà du temps imparti. Et que dire de BB King? Du haut (façon de parler, il a passé tout le concert assis) de ses 83 ans, il est encore en train de jammer avec ses amis - et quels amis: George Duke, Grace Jones, Lee Ritenour, George Benson, même Quincy Jones est venu faire un petit coucou - à 2 h du mat'.
Lorsque tous entonnent «You are my sunshine», on oublie l'heure, la longue route parsemée de travaux pour rentrer, les lendemains qui déchantent au boulot. On savoure juste le moment. De partage, de respect du public. De bonheur. Et si c'était ça le vrai esprit du rock'n'roll?